Russie : liberté pour les sept de Penza !19/02/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/02/2690.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Russie : liberté pour les sept de Penza !

Le tribunal militaire de Penza, une ville d’un demi-million d’habitants dans le centre de la Russie d’Europe, vient de frapper lourdement sept jeunes anarchistes. Membres du groupe Set’ (le Réseau), ils étaient déjà incarcérés depuis fin 2017, inculpés d’avoir préparé des attentats en Russie lors de l’élection présidentielle, puis du Mondial de football. Trois autres de leurs camarades, arrêtés à Saint-Pétersbourg, doivent être jugés d’ici fin février.

Les peines prononcées vont de six à neuf ans de colonie pénitentiaire à régime dit ordinaire pour deux d’entre eux, et de dix à dix-huit ans de pénitencier à régime sévère pour les cinq autres.

Ce sont de lourdes peines, en accord avec la façon dont la FSB (la police politique qui a succédé au KGB) et le pouvoir mènent d’ordinaire la répression en Russie. Car il y est courant d’accuser de terrorisme des militants d’extrême gauche, de les incriminer, afin de les discréditer, d’avoir organisé un trafic de drogue et d’être liés avec le groupe fascisant ukrainien Pravyi Sektor. Ordinaires sont aussi la façon d’obtenir des aveux sous la torture et la réponse à ce sujet du procureur : l’enquête (menée, sinon par les tortionnaires, par leurs collègues) n’a pas confirmé les dires des accusés… Et c’est encore la routine pour la police que d’avoir fabriqué des preuves : des carabines de jeu présentées comme des armes de guerre, de la poudre à canon déposée chez un jeune.

À l’audience, tout en se revendiquant des idées anarchistes antiautoritaires, les sept jeunes ont dénoncé ces accusations comme absurdes, sans lien avec la réa­lité, tout comme les aveux qu’on leur a arrachés.

Chargés par la FSB de faire un exemple, les juges n’ont pas bronché. Le tribunal en a même rajouté dans le zèle répressif, en ordonnant la destruction de biens appartenant aux accusés, tels des téléphones mobiles, des cartes SIM, mais aussi Le Capital de Marx, « un moyen pour commettre un crime, mais sans valeur ». C’est ridicule, à moins que les juges aient pensé que, Marx ayant décrit son ouvrage comme « la plus redoutable bombe qui ait été lancée à la face de la bourgeoisie », cela pouvait étayer leur accusation de détention d’engin explosif !

Au chapitre des coups tordus et coups tout court des agents du Centre E (E pour « lutte contre l’extrémisme »), une branche de la police politique très active dans tout le pays, il faut ajouter ce qui est arrivé à des soutiens et amis des condamnés. Le soir du jugement, la police politique en a arrêté quatre qui repartaient en train vers Moscou, et vingt autres qui passaient la nuit chez des proches des accusés, la police continuant de monter la garde au pied de leurs logements les jours suivants.

Les avocats des sept de Penza vont faire appel. Sans grandes illusions, disent-ils. Quand cela fait trop scandale, comme récemment à Moscou, le Kremlin peut ordonner qu’on relâche un journaliste critique, chez qui la police avait déposé de la drogue. Mais, dans des villes comme Penza, policiers et juges se sentent les mains libres pour frapper tout ce qui bouge, et qui pourrait inciter la jeunesse à le faire. Surtout quand il s’agit de petits groupes d’extrême gauche. Car, malgré tous les efforts des autorités et de leurs sbires, de tels groupes apparaissent et réapparaissent régulièrement dans les villes de Russie, comme une expression spontanée mais bien vivante du refus, dans la jeunesse, d’un ordre social et politique injuste.

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