Dans les entreprises

SNCF : après l’accident des Ardennes, une démonstration de force des cheminots

« Si certains des membres du gouvernement pensaient avoir remporté une victoire décisive l’an passé après plusieurs mois de grève (à la SNCF), en imposant la fin du statut pour les nouveaux embauchés, ils doivent déchanter aujourd’hui. » C’est le constat amer qu’a fait le journal Les Échos après la mobilisation massive des cheminots, à la suite de l’accident ferroviaire survenu dans les Ardennes mercredi 16 octobre.

Le mouvement de droit de retrait s’est en effet spontanément propagé chez les conducteurs et contrôleurs de la région, le soir-même de l’accident. Plus aucun train ne circulait le jeudi 17 au matin entre Reims, Épernay et Charleville. Puis il s’est répandu comme une traînée de poudre à l’échelle du pays, chez les conducteurs et les contrôleurs dans les heures qui ont suivi.

Vendredi, le trafic était très faible sur les lignes RER d’Île-de-France. En Occitanie, le trafic TER était nul et quasi inexistant dans de nombreuses régions. Seulement un train Intercités sur deux circulait. Le trafic TGV était aussi touché sur le sud-est et l’axe Atlantique. Tous les Ouigo étaient annulés samedi et partiellement le dimanche. Mardi, le mouvement continuait encore dans le Grand-Est et les Pays de Loire.

L’extension du mouvement a été largement spontanée, même si les syndicats, dont le plus influent à la SNCF, la CGT, ont choisi de le rallier et de le soutenir. Dans plusieurs endroits, la présence de militants à la prise de service a aussi compté face aux pressions et menaces de l’encadrement, aux mises en demeure.

L’émotion et la colère dominaient devant ce nouvel accident survenu sur un de ces passages à niveau, dont la suppression est toujours remise aux calendes grecques. Mais surtout, chaque cheminot pouvait s’identifier au conducteur, rescapé miraculeux de la collision, et obligé, pour éviter le suraccident et la catastrophe, de surmonter ensuite à lui seul toutes les défaillances de la SNCF en matière de sécurité.

Car les cheminots de tous les services vivent au quotidien les suppressions insupportables d’effectifs, la recherche effrénée des gains de productivité au mépris de la santé et de la sécurité des cheminots et de celle des circulations.

Avant même la démonstration de force qu’a constituée ce droit de retrait collectif, de nombreux conflits locaux avaient éclaté dans la période récente à la SNCF, sur des questions de roulements, de conditions de travail. Ils ne sont que la traduction d’une même résistance à une même politique nationale. Eh oui, la réforme ferroviaire a bien été adoptée par les députés en 2018, mais c’est une autre affaire que de la faire passer dans la réalité !

Le sentiment qui dominait partout était la surprise et la fierté d’avoir su réagir à l’unisson et d’avoir relevé la tête.

Après le succès spectaculaire de la grève du 13 septembre à la RATP, cette nouvelle secousse est-elle annonciatrice d’un mouvement plus large ? C’est en tout cas l’inquiétude du gouvernement à l’approche du 5 décembre. L’intérêt des travailleurs est bien de faire en sorte que cette crainte soit fondée !

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