Burkina Faso : régime corrompu et terreur djihadiste23/10/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/10/2673.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Burkina Faso : régime corrompu et terreur djihadiste

La population burkinabé vit une situation qui ne cesse de se dégrader. C’est un des résultats dramatiques de l’intervention militaire française débutée au Mali voisin en janvier 2013 et qui, loin de mettre fin au terrorisme, l’a au contraire disséminé dans toute la région.

Un tiers du pays échappe aujourd’hui à tout contrôle, notamment dans les zones frontalières du Mali et du Niger. Près de 500 000 personnes ont été obligées de fuir dans des régions plus sûres à l’intérieur du pays. Elles se sont réfugiées dans des familles voulant bien les accueillir ou sur des terrains de transit. La moitié sont arrivées ces trois derniers mois, car la situation s’aggrave de jour en jour. 2 000 écoles au moins ont été fermées, les rares centres de santé dévastés, et l’armée elle-même n’est pas épargnée. Le 19 août, la caserne de Koutougou avait été attaquée et 28 soldats tués. Les gradés, eux, avaient quitté les lieux un peu auparavant.

Comme au Mali voisin, la déliquescence de l’État burkinabé jette une partie des jeunes dans les bras des groupes djihadistes. Il y a cinq ans le dictateur Blaise Compaoré avait dû quitter le pouvoir et s’enfuir sous la pression de la population, mobilisée dans la rue contre la corruption de son régime. Mais depuis, et alors que l’actuel président Marc Roch Christian Kaboré avait promis une tolérance zéro contre la corruption, celle-ci est partout présente. Il ne se passe pas de jour sans que la presse révèle des cas de malversation, de fraude ou de racket. Cela n’empêche pas leurs auteurs de jouir de la plus totale impunité de la part d’un appareil d’État composé pour une bonne part de personnes recyclées de l’ancien régime. L’armée elle-même en est victime, et se retrouve moins bien équipée que les djihadistes. Les sommes toujours en hausse affectées au budget de la défense se perdent dans les hautes sphères de l’état-major, leur destination étant couverte par le secret défense.

Les villageois sont pris dans ce réseau de prédations et de malversations. Les groupes armés djihadistes terrorisent la population, mais l’armée burkinabé n’est pas moins crainte. Non seulement elle est bien incapable de protéger les habitants, mais les soldats débarquent dans des familles sous prétexte que l’un de ses membres a rejoint les groupes armés, tuant, pillant et s’en prenant parfois au village tout entier. Et, comme au Mali voisin, le gouvernement n’hésite pas à instrumentaliser les divisions ethniques, les milices mossies attaquant les Peuls accusés en bloc d’être des djihadistes.

Le gouvernement français envisage maintenant une intervention militaire plus importante, celle de l’opération Barkhane, au Burkina-Faso. Son souci n’est pas tant la situation dramatique de la population que le risque que, avec l’État burkinabé, ne s’effondre une barrière empêchant les djihadistes de pénétrer massivement dans un pays comme la Côte d’Ivoire, autrement plus important pour les intérêts de l’impérialisme français. Mais, comme au Mali, l’intervention militaire française est bien impuissante à enrayer cette menace. En soutenant des régimes corrompus, elle sert au contraire de carburant au développement des groupes armés djihadistes.

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