La France et les soldats d’Afrique : le temps maudit des colonies21/08/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/08/2664.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La France et les soldats d’Afrique : le temps maudit des colonies

Jeudi 15 août, Emmanuel Macron a salué « la part d’Afrique » qui constitue la France, et plus précisément la part « du sang versé » par les soldats issus des colonies françaises d’Afrique au moment du débarquement de Provence le 15 août 1944.

Les 250 000 soldats de la 1ère Armée qui a débarqué en Provence étaient pour beaucoup des Algériens, des Marocains, des Tunisiens, mais aussi des Sénégalais, des Ivoiriens, des Guinéens, des Malgaches, engagés car poussés par la faim, et bien plus souvent encore enrôlés de force.

Au moment du débarquement, ces hommes étaient en première ligne. Mais, dès la remontée du Rhône, l’armée fut blanchie et les soldats africains laissés à l’arrière pour faire place à de nouvelles recrues et à des maquisards FFI.

Il s’agissait d’accréditer l’idée que la France s’était libérée seule. Ce mythe était propagé par toutes les forces politiques, du PCF aux gaullistes, pour légitimer l’appareil d’État dans son rôle de défenseur de l’ordre social. Il était aussi urgent de se débarrasser de ces soldats coloniaux qui avaient manié les armes et qui pensaient pour beaucoup que l’État leur était redevable. Les rapatriements commencèrent. Le 1er décembre 1944, des soldats africains, renvoyés au Sénégal au camp de Thiaroye, se révoltaient pour le paiement de leur solde. Au moins 70 d’entre eux furent tués.

À cette époque, loin de reconnaître le « sang versé », le gouvernement répondait par des massacres aux revendications des populations colonisées. Ce fut le cas en Algérie, à Sétif en 1945, comme à Madagascar et au Cameroun à partir de 1947.

Aujourd’hui, Macron parle d’une « gratitude impérissable » due aux soldats d’alors. Cela ne lui coûte pas cher et lui permet de faire reluire son auréole humaniste quelque peu ternie. Oublier ces centaines de milliers de sacrifiés, ou se faire une gloire de les avoir transformés de force en chair à canon, voilà à quoi se réduit ce chapitre de l’histoire républicaine.

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