Libye : les assassins et leurs commanditaires

17 Juillet 2019

Le 3 juillet des missiles ont été tirés sur un camp de détention de migrants, dans la banlieue de la capitale libyenne Tripoli, faisant au moins 53 morts et 130 blessés. Les autorités françaises ont aussitôt condamné ce bombardement et rappelé aux parties en présence qu’elles avaient le devoir de protéger la vie des migrants. Cela s’appelle ne reculer devant aucune tartufferie.

La politique française en Libye porte une lourde responsabilité dans la situation de ce pays et les massacres qui y sont perpétrés. Depuis 2011 et la chute du dictateur Kadhafi, poussé dehors par les bombardements occidentaux puis exécuté par les services français, diverses milices armées se disputent le pouvoir et la rente pétrolière. Elles le font au nom de compagnies pétrolières occidentales concurrentes et avec le soutien financier, militaire et logistique des puissances impérialistes rivales, notamment la France, l’Italie et les États-Unis, chacune soutenant, plus ou moins discrètement, son poulain.

En plus d’être le champ clos des rivalités pétrolières, la Libye est depuis Kadhafi une barrière au passage des migrants allant du sud vers le nord, de l’Afrique vers l’Europe. L’existence même des camps de migrants comme celui qui a été bombardé, regroupant des milliers de personnes dans des conditions horribles, résulte de la politique de l’Union européenne, France et Italie en tête. Ce sont ces derniers pays qui payent des bandes libyennes ainsi que les gardes-côtes, pour intercepter les migrants tentant de traverser la Méditerranée vers l’Italie et les conduire dans des camps. C’est la France qui a fourni des vedettes rapides capables de faire ce sale travail, c’est l’Union européenne qui paye pour qu’on retienne prisonniers les malheureux qui cherchent un endroit où vivre sur cette planète.

Enfin, achevant de démontrer la responsabilité particulière de la France dans cette tragédie, les soldats du gouvernement libyen reconnu par l’ONU ont fait une curieuse découverte. Pénétrant dans des locaux abandonnés par leurs adversaires, les soldats du maréchal Haftar, ils y ont trouvé des missiles antichars de fabrication américaine appartenant à l’armée française. La ministre de la Défense, Florence Parly, a eu bien du mal à expliquer la présence de ce matériel dans l’arsenal du maréchal. Après quelques hésitations, une version digne de la bibliothèque rose a été offerte aux médias nationaux qui l’ont gentiment acceptée. D’après la ministre, les missiles étaient là pour protéger des conseillers français, présents sur place pour aider Haftar à lutter contre Daech. Les matériels avaient été désactivés après le départ des conseillers et étaient stockés en attente de destruction. Et la ministre d’ajouter que jamais la France n’avait aidé Haftar dans sa lutte contre le gouvernement reconnu par l’ONU.

On finira peut-être par savoir qui a tiré les missiles sur le camp de réfugiés, qui les avait fabriqués et qui les a vendus ou offerts aux assassins. Quoi qu’il en soit, les responsables sont les compagnies pétrolières qui se disputent l’or noir libyen, les États comme la France qui sont leurs bras armés et les politiciens qui tentent de les couvrir par leurs pitoyables mensonges.

Paul GALOIS