Leur société

Canicule : les bons conseils du gouvernement

« Je ne veux pas qu’on me reproche de ne pas en avoir assez fait », a déclaré Buzyn, la ministre de la Santé, à un journaliste qui suggérait qu’elle en « faisait beaucoup » pour préparer la population à l’épisode de canicule de cette fin-juin.

Du côté des ministres en effet on se montre, on recommande, on brasse de l’air. La ministre semble plutôt satisfaite : « On est plus préparé qu’en 2003 : on ne savait pas ce qu’était une canicule », faisant allusion à cet été où la surmortalité avait touché 15 000 personnes dans le pays. Mais le spectre de la vague de chaleur, des températures élevées le jour comme la nuit, la poursuit, de même que ses collègues.

Avec quel résultat ? Pour l’essentiel, les ministres abreuvent la population de conseils de bon sens, s’hydrater, marcher à l’ombre, se mettre au frais, dont personne, dès l’âge de 7 ans, n’a plus guère besoin. Au-delà, ils dispensent dans les médias quelques cours de morale : « aller voir sur son palier une personne âgée et la faire boire, même si elle n’a pas soif », se préoccuper des anciens, des plus pauvres (Buzyn n’est « pas sûre que chacun donne une bouteille d’eau aux SDF dans la rue »). Cela va plus loin : dans le domaine de la vie privée, Buzyn passe son temps à dire : «Arrêtez de mettre des cravates et des costumes ! » Car beaucoup sans doute n’y auraient pas pensé tout seuls et gardent leur doudoune et leur chapka ! Mais l’ancienne médecin se sent peu écoutée, ses consignes, dit-elle, ne sont pas prises au sérieux, « les sportifs continuent de courir »

Plus concrètement, à part quelques fontaines, salles réfrigérées, maraudes renforcées en Île-de-France pour secourir les personnes SDF, on est loin de véritables solutions pour aider à supporter les grandes chaleurs et lutter contre les souffrances qu’elles peuvent provoquer. Concernant les services hospitaliers d’urgence, déjà complètement engorgés comme en témoigne le mouvement actuel du personnel et le vécu de nombreux patients, rien n’est fait. Buzyn se contente de constater que « les personnels ne sont pas encore partis en vacances ». Elle affirme qu’elle a « débloqué des enveloppes pour les services en tension (...), 15 millions pour l’été, et entendu les revendications des urgentistes, attribué une prime de risque pérenne de 100 euros, ainsi qu’une prime de coopération ».

De son côté, le ministre du Logement, Denormandie, répétant à son tour que « la canicule, c’est grave », semble fort satisfait d’avoir rappelé aux entreprises du BTP qu’il convient d’adapter les horaires sur les chantiers, et qu’il serait souhaitable d’y mettre en place des centres réfrigérés. Ce sera au bon vouloir des donneurs d’ordres, les Bouygues et les Vinci : des humanistes, comme chacun sait. Car le Code du travail, lui, ne dit mot des températures maximales sur le lieu de travail. Tout au plus l’employeur doit-il fournir de l’eau et de l’aération. Quant à aller travailler en tongs, comme suggère le ministre, ce n’est ni autorisé ni surtout recommandé dans les ateliers.

À voir ces gens gérer l’urgence, on ne peut leur faire confiance sur le plus long terme, pour instaurer, en matière de logement, d’urbanisme, de rythmes et de conditions de travail, de quoi rendre supportables des vagues de grande chaleur.

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