Espérance de vie : mieux vaut être riche et en bonne santé...27/02/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/02/2639.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Espérance de vie : mieux vaut être riche et en bonne santé...

Depuis plusieurs années, l’augmentation de l’espérance de vie a été mise en avant par les gouvernements pour justifier de nombreux mauvais coups, en particulier le recul de l’âge de départ en retraite. Mais non seulement l’espérance de vie dépend du milieu social, mais elle stagne en France depuis quatre ans.

En dehors de périodes de guerres, l’espérance de vie n’a pourtant cessé de progresser au 20e siècle, gagnant en moyenne trente ans, en raison de l’amélioration de l’état sanitaire du pays et surtout des progrès médicaux majeurs, comme la vaccination ou l’utilisation d’antibiotiques.

Mais si la recherche médicale continue de progresser, ce n’est manifestement plus le cas de l’espérance de vie.

En effet, d’après le dernier bilan démographique de l’Insee, celle des hommes atteignait 79,2 ans en 2014 et n’a quasiment plus bougé depuis. Celle des femmes a légèrement diminué, passant de 85,4 à 85,3 ans.

L’espérance de vie dépend largement du niveau de vie. D’après l’étude de l’Insee, en dessous de 1 000 euros mensuels, elle est de 71,7 ans pour un homme alors qu’elle est de 84,4 ans à 6 000 euros, soit 13 ans d’écart. « Aux alentours de 1 000 euros par mois, 100 euros par mois sont associés à 0,9 an d’espérance de vie en plus chez les hommes, 0,7 an chez les femmes. »

Or, un épidémiologiste américain constate que « la montée de l’inégalité est la première cause de cette stagnation de l’espérance de vie » en soulignant qu’en France, malgré un accès aux soins encore supérieur à celui d’autres pays, « l’augmentation du nombre de pauvres va tirer l’espérance de vie vers le bas ».

Ce n’est pas un phénomène propre à la France, puisqu’aux États-Unis, l’espérance de vie a carrément chuté et ce recul frappe en particulier les classes populaires. En Grande-Bretagne, un démographe indiquait que « entre 1921 et 2011, l’espérance de vie a progressé d’environ un an tous les quatre ans, de façon relativement linéaire. Mais, depuis 2011, le ralentissement a été spectaculaire, jusqu’à la stagnation actuelle. » Il expliquait que : « Si plus de gens vivent sous le seuil de pauvreté, qu’on réduit les aides aux personnes âgées, que le budget du système de santé ne progresse pas, qu’il y a plus de sans-abri, peut-être qu’on ne devrait pas être surpris des conséquences. »

Un autre indicateur, celui de l’espérance de vie en bonne santé, c’est-à-dire sans incapacité affectant la vie quotidienne, montre la même évolution. Elle n’est en France que de 62,7 ans pour les hommes et de 64,1 ans pour les femmes, c’est-à-dire à peine supérieure à l’âge de départ en retraite. Elle n’atteint pas 60 ans pour les ouvriers et cet indicateur stagne lui aussi depuis dix ans.

Si de nombreuses raisons peuvent expliquer la stagnation de l’espérance de vie, voire son recul, il n’est pas étonnant que cela survienne au moment où la société consacre de moins en moins d’argent à la santé publique, se montre de moins en moins capable de financer un système de santé digne de ce nom. Cette évolution-là, c’est celle du capitalisme en crise.

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