Leur société

Migrants : la solidarité gagne un procès

La préfecture des Alpes-Maritimes a en 2018 à son actif 29 000 renvois de migrants vers l’Italie, souvent en bafouant la loi. Son préfet, Georges-François Leclerc, n’avait pas digéré qu’un militant solidaire des migrants, Cédric Herrou, compare sur Facebook cette politique antimigrants à celle de Vichy vis-à-vis des Juifs. Le préfet a perdu son procès.

« Peut-être le préfet des Alpes-Maritimes pourrait-il s’inspirer des accords avec la SNCF pendant la Deuxième Guerre mondiale sur le transport des Juifs pour gérer le transport des demandeurs d’asile », avait écrit Cédric Herrou, scandalisé par l’attitude des autorités face aux migrants qui tentent de franchir les Alpes. À l’époque de cet écrit, Cédric Herrou et les militants de la vallée de la Roya avaient voulu aider 90 migrants en leur proposant de prendre le train pour Nice et d’y déposer une demande d’asile. Les migrants avaient été empêchés de prendre le train et avaient dû s’y rendre à pied, après trois jours de marche.

En octobre dernier, une procureure avait requis contre Herrou le paiement d’une amende de 5 000 euros. Restait à savoir si les juges suivraient. La journée choisie pour le jugement, la Saint-Valentin, a déclenché l’ironie des soutiens du militant, rassemblés devant le tribunal. Les banderoles donnaient le ton : « L’amour est dans le pré-fet » ou encore « Le préfet se fait des films herroutiques ». Les juges ont décidé de relaxer Cédric Herrou. Le préfet débouté n’a eu pour consolation que le soutien obtus d’un Christian Estrosi.

Ce n’est pas la première fois que ce zélé fonctionnaire est désavoué par la justice. Entre 2017 et 2018, il a été condamné à quatre reprises pour non-respect du droit d’asile et mauvais traitements à l’égard de mineurs étrangers isolés. Et actuellement encore une enquête est en cours, à la demande de la Ligue des droits de l’homme et du Syndicat national des avocats, suite à des plaintes signalant des infractions de policiers des frontières à Menton, là encore contre des mineurs.

La politique répressive contre les migrants n’est pas sans conséquences graves. Elle vient encore de tuer un migrant de 28 ans, près de Briançon dans les Hautes-Alpes. Membre d’un groupe de migrants qui tentaient de franchir les Alpes en évitant la police, il a perdu ses bottes et a continué de marcher dans la neige en chaussettes. Alors qu’il était au plus mal, ses amis ont essayé de stopper des voitures pour qu’il soit emmené vers un hôpital, mais aucune ne s’est arrêtée. Il est mort le 14 février et une enquête pour non-­assistance à personne en danger est ouverte.

Les militants de cette région solidaires des migrants préparent maintenant une maraude géante pour les aider. Elle partira de Montgenèvre le 15 mars. Contre des lois répressives et des politiques réactionnaires, la solidarité doit vivre.

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