Électricité : EDF préfère les gros

06 Février 2019

La hausse de l’électricité aurait dû avoir lieu ces jours-ci, s’il n’y avait pas eu les gilets jaunes. Le gouvernement a donc décidé de surseoir. Il ne peut y avoir de hausse en hiver, a dit un ministre. La hausse prévue aura donc lieu plus tard, sans doute en juin.

Ce n’est pas la première fois qu’un gouvernement, craignant le mécontentement populaire, reporte une telle hausse. Dans ce cas EDF, qui appartient presque entièrement à l’État, ne proteste pas. En revanche les nombreuses sociétés concurrentes qui fournissent de l’électricité se plaignent et la hausse, accompagnée d’un rattrapage, finit bien par avoir lieu, mais plus tard. Ce qui va surement se passer.

Depuis les années 2000 le marché de l’électricité a été ouvert et la concurrence autorisée. Mais en France, contrairement à bien des pays européens, il n’y avait qu’un seul fournisseur, EDF, et donc il a fallu inventer les concurrents, notamment par un dispositif légal qui est une véritable escroquerie : EDF est obligée de vendre à un prix relativement bas le quart de sa production nucléaire à ses concurrents, qui n’ont jamais financé les centrales. Ces nouveaux fournisseurs, véritables parasites, ne produisent pas d’électricité, sauf quelques exceptions. Ils la rachètent puis la revendent, s’engraissant au passage.

Une Commission de régulation de l’énergie veille aux tarifs et au respect de la concurrence. Elle est composée d’une demi-douzaine de membres non élus, nommés par le président du Sénat, celui de l’Assemblée nationale, etc. C’est cette commission qui vient de décider que l’augmentation, qu’elle juge normale, devrait être de 5,9 %. Parmi les raisons pour justifier cette hausse, « l’augmentation s’explique aux trois quarts par le bond des prix de l’électricité sur le marché de gros, lié notamment à la hausse des cours du carbone ». Comme on voit, il n’y a là rien qui concerne le fonctionnement des centrales, rien que de la spéculation.

Le gouvernement, pour contrer la colère qui finira par venir, envisagerait paraît-il de diminuer certaines taxes qui pèsent sur l’électricité. Elles représentent environ 37 % des factures. Pour le moment, il n’a allégé les taxes que pour les gros industriels, ceux qu’on appelle les électro-intensifs (20 % de la consommation du pays). Le coût total de ces exonérations était de 968 millions d’euros (pas loin du milliard !) en 2016. Mais ceux qui devraient être exonérés en priorité sont les petits consommateurs, les salariés aux bas revenus, qui en sont réduits à économiser sur l’éclairage et le chauffage.

André VICTOR