Pêche : poisson frais et capitalisme avarié19/12/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/12/2629.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Pêche : poisson frais et capitalisme avarié

L’UFC-Que choisir a publié le 17 décembre un rapport sur l’origine des trois espèces de poissons les plus vendues en grande surface.

L’étude ne traite que de poissons sauvages pêchés, soit la moitié de ce qui est consommé, l’autre provenant des fermes marines. Il en ressort que les indications de provenance sont souvent fausses, voire carrément absentes.

Cette pratique permettrait de cacher le fait que 86 % de ce qui est proposé provient d’une pêche dite non durable, c’est-à-dire faite sans se soucier du renouvellement de la ressource.

Le même jour, les professionnels de la pêche attendaient les décisions de l’Union européenne quant à sa réglementation dans les eaux communautaires. Ces règlements, en perpétuelle évolution, issus d’années de négociations entre armateurs, États, associations écologistes, scientifiques, syndicats de travailleurs de la mer, etc. sont extrêmement complexes et tatillons. Ils définissent la taille des poissons ou crustacés qu’on peut prendre, ceux qu’on doit remettre à l’eau ou au contraire garder même s’ils ne valent rien. Ils répartissent les quotas de pêche entre les flottes des différents pays membres et statuent sur bien d’autres choses encore. Cette somme énorme de réglementation prétend trouver sa justification dans la protection des espèces peuplant les eaux européennes. Il s’agirait de leur éviter le sort des baleines ou de la morue de Terre-Neuve, toutes deux exterminées pour avoir eu le malheur d’être exploitables par l’industrie capitaliste.

Les progrès de la technique font que quasiment toutes les espèces marines sont désormais exploitables, du milieu de l’océan où les satellites les repèrent, jusqu’aux grandes profondeurs où les sondeurs les découvrent et d’où de puissants moteurs arrivent à arracher des filets toujours plus performants. Le plus petit organisme vivant remonté est transformable en farine qui ira nourrir les poissons des fermes marines ou les poulets élevés en batterie. Le plus récent bateau-usine lancé à Saint-Malo rapporte en deux mois de campagne, avec un équipage de 35 hommes, 700 tonnes de cabillaud congelé et 200 tonnes de farine. Rien n’est rejeté à la mer. Et il est encore très loin des gigantesques bateaux-usines qui opèrent dans les eaux internationales, c’est-à-dire en dehors de toute réglementation et de toute contrainte.

Le rapport de Que choisir est certes partiel et il a été immédiatement contesté par des organismes professionnels. Mais il montre au moins que les règles établies par l’UE, efficaces ou non, ne sont pas respectées. Les capitalistes qui arment à la pêche – car ce ne sont pas les quelques petits patrons pêcheurs qui subsistent qui vont racler les fonds au large des îles Feroé – et leurs homologues de la grande distribution s’assoient sur les règlements. Comme leurs aïeux, mais plus rapidement encore et plus radicalement, ils sont prêts à vider l’océan de toute vie pour remplir leurs coffres-forts.

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