Ford – Blanquefort : la dictature du capital19/12/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/12/2629.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Ford – Blanquefort : la dictature du capital

Ford a annoncé jeudi 13 décembre sa décision de rejeter le plan de reprise de l’usine de Blanquefort, près de Bordeaux, par l’entreprise Punch Power Glide. Dans le même communiqué, Ford confirmait la fermeture définitive du site, déjà annoncée au printemps dernier, pour août 2019. Le constructeur automobile sacrifie donc sur l’autel de ses profits, qui se montaient à plus de sept milliards de dollars en 2017, près de 900 emplois directs, 3 000 avec les emplois induits.

La recherche d’un repreneur est une obligation légale. Mais rechercher ne veut pas dire trouver et encore moins accepter. Ainsi, ce n’est pas le cabinet mandaté par Ford pour examiner les offres de reprise du site qui a trouvé Punch, que Ford avait déjà rejeté une première fois mi-octobre, mais ce sont l’État et les syndicats qui ont négocié avec cette entreprise belge un nouveau plan de reprise, présenté à Ford le 11 décembre. Ce plan de reprise ne concernait que 300 à 400 travailleurs, les autres bénéficiant de conditions de préretraite jugées favorables. Il a à peine été regardé par Ford qui, en réalité, a décidé depuis longtemps de fermer l’usine. En 2008, Ford avait trouvé un repreneur à qui sous-traiter la fermeture. Mais l’échec de ce repreneur, qui au passage puisa quelques millions dans la caisse avant de mettre la clé sous la porte, fut trop rapide et trop voyant. Ford dut reprendre le site en 2011, largement aidé par l’État et les collectivités locales au travers d’un plan de 50 millions d’euros de subventions publiques, un plan qui courait jusqu’au printemps 2018. Aujourd’hui, comble du cynisme patronal, Ford justifie le rejet de la reprise par Punch en prétextant que cela ne limiterait pas « le risque de possibles pertes d’emplois futures ».

Quant à Macron et à Le Maire, ministre de l’Économie, ils crient d’autant plus fort à la trahison, à une décision hostile et inacceptable, que Ford a démontré qu’ils ne servent à rien, que dans cette société capitaliste, les véritables maîtres sont les actionnaires et les propriétaires des capitaux. Ford n’a même pas pris la peine de téléphoner au ministre de l’Économie avant de publier sa décision par communiqué de presse.

L’attitude du gou­vernement, relayée par les politiciens locaux et par les syndicats qui ont mis en avant la recherche d’une « solution industrielle », a contribué à aider Ford dans la mesure où elle a semé des illusions parmi les travailleurs. Pendant des semaines, le gouvernement a voulu faire croire à l’opinion publique qu’il était soucieux du sort des travailleurs, qu’un projet de reprise était possible, qu’il y avait des subventions publiques pour cela. En contrepartie, il a fait pression pour que les travailleurs acceptent le gel de leurs salaires, la perte des jours de RTT, la modulation du temps de travail sur des années… toutes choses inclues dans le plan de reprise par Punch. En somme, il fallait lui faire confiance. On voit ce qu’il en est aujourd’hui.

Pour que les travailleurs puissent défendre leur peau face à un trust comme Ford, et quelles que soient leurs revendications sur les préretraites, l’emploi ou les primes de départ, ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes, sur leur capacité à mener une lutte collective, en cherchant à entraîner les travailleurs des entreprises de la région. Et cela peut rester un objectif pour les mois à venir.

Cette décision cynique de Ford a déclenché une grande colère chez nombre d’ouvriers de l’usine, et un sentiment de solidarité chez tous les travailleurs de la région. Et cela, c’est une force. Ford est un trust multimilliardaire. Il y a de l’argent dans ses coffres pour le faire payer.

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