Leur société

Pétain : serviteur de la bourgeoisie, en 1940 comme en 1914

Même s’il a dû finalement reculer, Macron a voulu célébrer, parmi les maréchaux de la Première Guerre mondiale, la mémoire de Pétain. Pour se justifier, il a déclaré que le « grand soldat » de la guerre de 1914-1918 n’avait rien à voir avec le maréchal d’extrême droite qui a dirigé entre 1940 et 1944 un gouvernement qui a participé au génocide des Juifs et qui a collaboré avec l’Allemagne nazie. Mais vouloir faire croire qu’il y aurait eu deux Pétain, le bon de 1914 et le mauvais de 1940, est une imposture.

En 1914, Pétain n’était qu’un simple colonel. Pour gagner ses galons de maréchal, ce « grand soldat » ne se contenta pas d’envoyer au massacre des centaines de milliers d’ouvriers et de paysans, tous sacrifiés pour défendre les intérêts des capitalistes français. Comme le reste de l’état-major, il contribua aussi à instaurer un climat de terreur sur le front, pour obliger les soldats à marcher à l’abattoir, le revolver sur la tempe. Et quand une partie d’entre eux se révoltèrent au printemps 1917, il dirigea la répression. Il rétablit alors les conseils de guerre qui prononcèrent plus de 530 condamnations à mort ou à perpétuité et la déportation de plus de deux mille soldats. Au passage, il faut reconnaître que Pétain ne fut en cela ni plus ni moins sanguinaire que les autres maréchaux à qui Macron a rendu hommage.

Les bons et loyaux services de Pétain à la bourgeoisie française ne s’arrêtèrent pas avec la fin de la guerre. En 1925, le gouvernement de gauche lui donna carte blanche pour mater l’insurrection qui avait éclaté dans le Rif marocain contre la colonisation de la France. La répression fut féroce, faisant plus de cent mille victimes. Pétain utilisa les moyens les plus modernes et les plus barbares de l’époque : chars, avions et armes chimiques, comme le gaz moutarde.

En 1934, il fut nommé ministre de la Défense dans un gouvernement d’union nationale composé d’hommes politiques de droite et de gauche. Puis en 1939 il fut nommé par le dernier gouvernement de la IIIe République ambassadeur dans l’Espagne de Franco.

Quand en 1940 Pétain fut appelé au pouvoir et instaura sa dictature, ses premières mesures furent de pourchasser les militants ouvriers, syndicalistes, communistes, socialistes pour paralyser les réactions éventuelles des travailleurs dans les entreprises. Et s’il choisit la collaboration en 1940, c’est parce qu’il pensait qu’avec la défaite, il fallait en France un pouvoir politique pouvant être l’interlocuteur de l’Allemagne nazie, de façon à sauvegarder les intérêts de la bourgeoisie française.

Durant sa longue carrière au sein de l’appareil d’État, comme dirigeant militaire, ministre, ambassadeur ou chef de gouvernement, il n’y eut qu’un seul Pétain : toujours fidèle aux possédants, quitte à faire massacrer les soldats, les travailleurs, les exploités en général, y compris les Juifs que l’occupant lui demandait en tribut.

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