Ryanair : la grève se prépare19/09/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/09/2616.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Ryanair : la grève se prépare

Le 28 septembre, les personnels de cabine de la compagnie aérienne Ryanair sont appelés à faire grève dans cinq pays d’Europe. Seront touchés l’Espagne, le Portugal, l’Italie, les Pays-Bas et la Belgique où 150 vols sont déjà annulés. L’appel pourrait s’étendre aux pilotes.

La colère contre la compagnie se généralise au sein du personnel, entretenue par les provocations répétées du directeur général O’Leary, qui se présente comme le défenseur des billets d’avion low cost pour tous. Après avoir menacé cet été de supprimer 20 % du personnel en Irlande en transférant le trafic vers la Pologne, il a continué mercredi 12 septembre face aux grévistes en Allemagne, en faisant planer la menace de suppression de vols dans des aéroports secondaires du pays.

La compagnie affiche des profits plantureux, encore 1,25 milliard d’euros prévus en 2018. Proposant aux voyageurs des billets à prix cassés, Ryanair a construit sa rentabilité en faisant la chasse au moindre coût et en organisant une exploitation poussée des salariés. Pour minimiser les coûts, les avions doivent tourner 18 heures par jour, avec des arrêts de 30 minutes entre deux rotations. Poussant un peu plus dans la rapacité, la direction a décidé que même les petits bagages en cabine seraient désormais payants. L’objectif n’est pas tant les revenus supplémentaires dégagés que de pousser les passagers à ne prendre que le strict minimum, pour limiter le poids de l’avion en vol et réduire sa consommation.

Les conditions de travail chez Ryanair sont lamentables, régulièrement dénoncées par le personnel, souvent sous couvert d’anonymat car la répression est immédiate. Les journées de service peuvent être de 13 heures, dont une partie ne sont pas payées, par exemple lorsqu’il y a du retard au décollage. Des équipages enchaînent jusqu’à six étapes par jour et non seulement doivent vendre un maximum de produits à bord, mais ensuite faire le ménage et les vérifications de sécurité pendant les brefs arrêts au sol. De nombreux pilotes sont embauchés sous le statut d’auto-entrepreneur, seule l’heure de vol effective étant payée. Les plus jeunes d’entre eux doivent payer à la compagnie près de 30 000 euros pour leur formation. Le personnel de cabine est en majorité employé par une société intermédiaire sous statut juridique irlandais, alliant pour l’employeur faible coût et flexibilité extrême. Pour les salariés, ce sont des salaires qui n’atteignent parfois pas les 1 000 euros, des tâches multiples, une pression incessante à la rentabilité, des coûts d’hébergement loin du domicile qui restent à leur charge. Un steward en colère résumait ainsi cette situation : « On est des esclaves avec des cravates. »

Après cinq grèves pendant l’été et des milliers de vols annulés, fin août Ryanair a dû commencer à céder en partie aux revendications des pilotes irlandais, renonçant aux réductions de postes envisagées pour l’automne à Dublin. Mais les exigences du personnel mises en avant dans toute l’Europe restent pleinement d’actualité : hausses de salaire, embauche des intérimaires, contrats de travail sous le droit du pays de résidence.

Le patron bravache a annoncé d’avance l’échec de la grève, dénigrant les mobilisations comme des faux-frais obligatoires. Il continue même de refuser l’indemnisation des passagers dont les vols ont été annulés pendant l’été. Mais la généralisation des mouvements à l’échelle européenne et la volonté d’associer les différentes catégories de personnel finiront par lui faire ravaler sa morgue.

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