RATP – Paris : après un accident mortel, la direction trouve un lampiste06/06/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/06/2601.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

RATP – Paris : après un accident mortel, la direction trouve un lampiste

En janvier 2016, sur la ligne 6 du métro, un voyageur avait trouvé la mort à la station La Motte-Piquet-Grenelle en tentant de sortir de la rame au moment où les portes étaient en train de se fermer. Le métro avait démarré alors qu’il était descendu sur le quai, mais avec son manteau resté coincé entre les portes, provoquant une chute mortelle.

Le conducteur de ce métro est passé en jugement il y a deux mois devant le tribunal de grande instance. La RATP lui a proposé les services d’un avocat. On ne peut pas dire que cela l’ait aidé ! La justice lui a fait porter toute la responsabilité de l’accident, dédouanant ainsi la RATP. Le jugeant coupable d’homicide volontaire par négligence, le TGI a condamné le conducteur à un an de prison avec sursis et 140 000 euros de dommages et intérêts. Les juges s’en sont tenus à la réglementation sans chercher à voir plus loin.

Mais comment un accident aussi dramatique peut-il se produire ? Des conducteurs de la ligne 6 pointent les défauts du matériel, des rames pneumatiques datant des années 1970. Parmi ceux-ci, il y a le problème du maintien de fermeture des portes. Il y a des années, un enfant pouvait passer la main entre elles lorsque qu’elles étaient fermées. À la suite d’une modification, on en est arrivé à l’excès inverse. Aujourd’hui, une écharpe ou un manteau coincé peuvent, si le conducteur ne s’en aperçoit pas à temps, faire risquer d’être traîné sur le quai, avant même que d’autres voyageurs aient le temps de réagir en actionnant un signal d’alarme. Dans l’affaire de La Motte-Piquet, quelqu’un avait tenté d’aider la victime à se décoincer, sans succès : c’est dire la force du maintien de fermeture.

Ce jugement arrange bien la RATP, si on le compare à une expertise ayant eu lieu lors d’un accident antérieur, en 2000, à la station Notre-Dame-de-Lorette. Un excès de vitesse avait alors provoqué le déraillement d’un train. Mais les experts ne s’en étaient pas tenus à la responsabilité du conducteur. Ils avaient souligné les négligences de la RATP, en l’occurrence l’absence de balises provoquant automatiquement un freinage d’urgence en cas d’excès de vitesse. Après cet accident, la RATP avait dû installer de telles balises à tous les endroits sensibles du réseau.

Pour l’accident de La Motte-Piquet, non seulement les dirigeants de la Régie s’en tirent à bon compte, mais ils ont poussé l’ignominie jusqu’à convoquer le conducteur à un conseil de discipline en vue d’une révocation, au nom de la sécurité ferroviaire ! Cet acharnement a provoqué un sentiment d’indignation chez les agents du métro, qui parlaient de double peine. Une bonne centaine d’agents étaient présents à ce conseil de discipline pour dire qu’ils en ont assez de la politique de plus en plus répressive de la RATP.

La direction s’est-elle souvenue que, en 1985, la plus grande grève du réseau s’était déclenchée à la suite d’une affaire similaire ? En tout cas la direction a proposé un « arrangement » : elle révoque le conducteur… pour le réembaucher immédiatement après en station.

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