Migrants : chassés d’un camp à l’autre

06 Juin 2018

Mercredi 30 mai, le camp de migrants du Millénaire, dans le 19e arrondissement de Paris, a été évacué. Lundi 4 juin, deux autres camps, à la Porte de la Chapelle et près du canal Saint-Martin, soit près de 2 000 personnes en tout, l’étaient à leur tour.

Certains migrants étaient sans doute impatients de quitter enfin ces lieux insalubres où ils vivaient depuis des semaines. La préfecture avait prévu des gymnases à Paris ou en Île-de-France pour qu’ils puissent se reposer quelques jours, voir un médecin, et pour que leur situation administrative soit étudiée.

Mais les situations sont variées. Parmi les personnes évacuées du camp du Millénaire, seulement 25 % étaient des nouveaux demandeurs d’asile, qui ont pu être aidés dans leurs premières démarches. 10 % avaient déjà obtenu le statut de réfugié mais vivaient toujours dans ce camp faute d’avoir pu trouver et financer un logement. 1 % sont des déboutés du droit d’asile et risquent d’être expulsés vers leur pays d’origine. La majorité, 65 %, ont déjà engagé une demande d’asile en France ou ont été enregistrés comme demandeurs d’asile dans un autre pays européen, souvent l’Italie, leur pays d’arrivée. Ces derniers, en vertu du règlement européen dit « de Dublin », devraient être transférés dans le premier pays où ils ont été repérés comme demandeurs d’asile, même si beaucoup ne le souhaitent pas.

Le gouvernement affiche la fermeté et prévoit d’expulser les « dublinés », et les déboutés du droit d’asile. C’est pourquoi plusieurs centaines d’occupants du camp du Millénaire avaient quitté les lieux avant l’évacuation pour rejoindre sans doute un autre lieu tout aussi insalubre de la capitale. À l’inverse, des migrants qui ne vivaient pas dans ce camp étaient venus spécialement pour être emmenés, avec l’espoir d’obtenir enfin une aide des autorités.

Car, pour la cinquantaine de migrants qui arrivent chaque jour à Paris, le gouvernement ne prévoit aucune politique d’accueil et d’hébergement. Il les laisse s’entasser pendant des mois dans des campements indignes, avant de les évacuer, dans le but principal de faire le tri de ceux qui peuvent rester. Mais inévitablement d’autres camps se formeront tant que cette politique sera poursuivie.

Hélène COMTE