Wipelec Ceres – Romainville : silence, on empoisonne !21/03/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/03/2590.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Wipelec Ceres – Romainville : silence, on empoisonne !

Les habitants du quartier des Ormes de Romainville sud, en Seine-Saint-Denis, n’ont pas envie de se taire sur les problèmes de santé auxquels ils font face.

38 cas de cancer ont été dépistés dans leur quartier, et on y dénombre de nombreux AVC et 21 décès. Ils se sont constitués en association et veulent des réponses sur la responsabilité de l’ancienne entreprise Wipelec.

Wipelec était une entreprise de traitement de métaux, sous-traitant de grands groupes d’aéronautique et d’armement tels que Safran et Thales. Un reportage dans l’émission Envoyé spécial a montré comment un patron voyou et pollueur peut pourrir la vie de milliers de gens en toute impunité.

L’usine, qui datait de 1937, fabriquait des solvants. Elle est passée de main en main ces vingt dernières années.

À l’époque, les patrons comme la mairie et la préfecture étaient au courant des risques pour la santé des habitants, puisque l’usine était classée Seveso. Mais personne n’en a soufflé mot. En 2003 Wipelec Ceres a racheté le site, mais en 2006, après avoir récupéré les marchés et quelques brevets, le dernier propriétaire a abandonné l’usine. C’est alors devenu une friche industrielle, ouverte à tous les vents, où les enfants du quartier se retrouvaient et où séjournaient des sans-domicile-fixe. Jusqu’au jour où, en 2010, un homme a été électrocuté en voulant récupérer du cuivre dans une armoire électrique.

La police et les pompiers ont alors découvert des fûts de produits toxiques, acide chlorhydrique, sulfurique, citrique, et autres bacs de liquides dangereux, de quoi faire sauter le quartier disaient les voisins.

On aurait pu penser que le préfet et la municipalité allaient faire le nécessaire, à commencer par l’évacuation des produits, la dépollution du site et le contrôle des taux de pollution dans les maisons. Or il n’en a rien été, et ce n’est qu’en fin 2014 qu’ont commencé les travaux de dépollution. La municipalité les a confiés à un fonds d’investissement suisse, la société Ginkgo, chargée à la fois de dépolluer le site et d’y construire des immeubles d’habitation.

Les habitants ont toutes les raisons de se méfier, d’autant plus que, depuis le commencement de cette dépollution le taux de d’émanations toxiques aurait augmenté dans les maisons aux alentours. Face à l’inquiétude des riverains, la municipalité se préoccupe plus de faire une opération immobilière que d’aider les habitants du quartier à défendre leur droit et leur santé, et reproche à l’association de faire baisser le prix du mètre carré par ses interventions. C’est : empoisonnez-vous, mais en silence ! La préfecture affirme elle même que le site est « historiquement pollué », le sol étant saturé d’émanations de benzène, de trichloréthylène et d’hydrocarbures. Malgré plusieurs condamnations au tribunal administratif, elle refuse toujours de publier les résultats d’un rapport réalisé en 2016 par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), suite à différentes analyses de toxicité.

L’attitude de la préfecture et de la mairie ne peut s’expliquer que parce que, pendant des décennies, elles ont fermé les yeux et n’ont ni contrôlé ni demandé des comptes aux différents propriétaires. Aujourd’hui, tout un quartier de la ville de Romainville est pollué, et c’est peut-être également le cas de la Dhuys, une rivière souterraine proche. Des dizaines de personnes sont victimes de cancers, de leucémies, d’AVC. Mais reconnaître l’état de catastrophe sanitaire du quartier entraînerait une indemnisation des riverains.

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