Italie : déraillement mortel, la sécurité en cause31/01/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/02/2583.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : déraillement mortel, la sécurité en cause

Jeudi 25 janvier, le déraillement près de Milan d’un train régional parti de Crémone a fait trois morts et 46 blessés, dont cinq dans un état très grave. Le manque d’entretien du réseau ferré est en cause dans le lourd bilan de cette catastrophe, qui s’est produite là où un déraillement avait déjà eu lieu en juillet dernier, celui-là sans faire de victimes.

Le train qui est sorti des rails peu avant sept heures du matin était bondé. Comme tous les pendolari, ces voyageurs qui prennent le train tous les jours pour aller travailler, les trois femmes qui ont perdu la vie dans l’accident avaient l’habitude de voyager entassées dans ces trains accumulant les retards. Les associations d’usagers des trains régionaux dénoncent depuis longtemps « l’Italie à deux vitesses, qui implique que les trains régionaux cèdent la place aux convois à grande vitesse, non seulement quand ils les croisent, ce qui entraîne des retards, mais aussi en termes d’investissements, ce qui ne manque pas de questionner sur la sécurité ».

Le 25 janvier, c’est bien la vétusté des voies qui a tué, un morceau de rail de 23 centimètres ayant littéralement sauté au passage du train. Réseau ferré d’Italie (RFI) et Trenord, la société exploitant cette ligne, ont immédiatement déclaré que le rail cassé pouvait être une conséquence de l’accident, et non sa cause. Deux jours plus tard, l’enquête mettait en évidence qu’un simple tasseau de bois avait été placé sous le rail, dont la jointure était usée et non boulonnée, pour essayer de limiter les oscillations provoquées par le passage des trains. Voilà ce que valent les assurances de RFI sur les contrôles et les investissements !

D’après le bilan des contrôles de l’Agence nationale de sûreté ferroviaire (l’ANSF) elle-même pour l’année 2016, « 14 % des vérifications sur les infrastructures et 11 % de celles sur les wagons et les locomotives révèlent des non-conformités aux normes de sécurité ». Quant aux investissements, en baisse constante, ils ont subi un coup supplémentaire après la crise de 2008 et le désengagement de l’État. Celui-ci a opéré une coupe de 22,7 % de ses transferts de budget aux régions pour les transports.

Dans leur journal paru au moment de la catastrophe, des militants cheminots de l’Internazionale (Italie-UCI) dénoncent ainsi cette politique : « C’est toute la “machine” du transport ferroviaire qui subit actuellement une véritable dégradation de toutes ses composantes (…). Les voyageurs, en particulier ceux qui prennent le train pour aller travailler, doivent savoir par exemple que, dans de nombreux tunnels, il est impossible de communiquer avec l’extérieur, même en cas d’alarme, (…) qu’il est désormais de règle de faire circuler des trains composés de deux sections qui ne communiquent pas entre elles et dont une seule est pourvue de personnel. (…)

La réduction des coûts que les compagnies ferroviaires appliquent depuis des années est à l’origine de cette dégradation, dont les régions aussi bien que l’État font mine d’ignorer les conséquences. Les larmes hypocrites des différents représentants des autorités, qui n’ont pas perdu l’occasion de quelques déclarations à chaud pour transformer le désastre en argument de propagande électorale, ne déboucheront sur rien. La lutte des cheminots pour la sécurité doit retrouver des forces et trouver le moyen de se joindre à l’indignation des travailleurs pendolari. »

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