Tunisie : colère contre la vie chère17/01/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/01/2581.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Tunisie : colère contre la vie chère

Dans une vingtaine de villes tunisiennes, dont la capitale, des manifestations ont eu lieu début janvier pour protester notamment contre l’adoption par les députés de la loi de finances 2018. Depuis le 8 janvier, un manifestant est mort à Tebourba à l’ouest de Tunis, plusieurs ont été gravement blessés, et plusieurs centaines d’arrestations ont eu lieu.

Comme dans d’autres pays répondant aux injonctions d’austérité du FMI, le gouvernement aux mains d’une alliance entre la droite dite modérée de Nidaa Tounès et les islamistes d’Ennahda, ainsi que la grande majorité des députés, ont décidé de mesures aggravant automatiquement la situation des classes populaires. La TVA augmente de 1 %, entraînant la hausse de la plupart des produits de base, sauf ceux qui sont subventionnés (pain, semoule, huile…). Une CSG est instituée ainsi que plusieurs nouvelles taxes, par exemple sur les grandes surfaces qui ne manqueront pas de les répercuter sur les consommateurs. La masse salariale dans la fonction publique devra être réduite, les salariés comprenant ce que cela signifie pour leurs fins de mois, voire leurs emplois.

Ces mesures s’ajoutent à la hausse des carburants et du gaz et à toutes celles entraînées par l’inflation et la perte de valeur du dinar par rapport au dollar et surtout à l’euro, une grande partie des échanges commerciaux se faisant avec l’Union européenne. Les habitants des régions de la Tunisie intérieure, les plus pauvres du pays, et ceux des banlieues lointaines de Tunis, ont d’autant plus ­réagi à la loi de finances qu’ils subissent, plus encore que dans les régions côtières ou au centre de la capitale, le poids du chômage, officiellement annoncé à 16 %. Le Premier ministre Youssef Chahed ne le nie même pas, « 40 % des jeunes diplômés sont sans emploi », sans parler des non diplômés. La population des environs de Gafsa ou Sidi Bouzid, dont la colère avait marqué le début des révoltes qui avaient conduit à chasser Ben Ali, vit, sept ans après, toujours dans le dénuement, et son désespoir éclate sporadiquement.

Comme le disait un manifestant de Tunis réclamant le retrait de la loi de finances, depuis 2011 la population a vu défiler huit chefs de gouvernement, près de 300 ministres, la vie a augmenté de 35 %, la corruption est toujours bien présente, et la loi dite de réconciliation administrative votée en septembre dernier à la demande du président Essebsi a permis de suspendre toute poursuite judiciaire contre les membres de l’ancien régime.

Après plusieurs jours de rassemblements, au cours desquels le gouvernement jugeait « qu’il n’y avait pas de manifestations, mais des casseurs », des mesures ont été annoncées, comme une couverture sanitaire gratuite garantie à 60 000 chômeurs dans les hôpitaux publics, une allocation supplémentaire aux familles les plus pauvres, une augmentation de 180 dinars (60 euros) des pensions des retraités les plus pauvres. Ce sera peut-être suffisant pour calmer momentanément l’expression du mécontentement, mais pas pour que la population des régions pauvres voie s’éloigner le chômage, ait accès aux droits minimaux à la santé, à l’éducation, à une couverture sociale.

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