Erdogan à Paris : la barrière aux migrants10/01/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/01/2580.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Erdogan à Paris : la barrière aux migrants

En visite à Paris début janvier, le président turc Recep Tayyip Erdogan est reparti avec le minimum, trois accords commerciaux dits de coopération, un lot de belles paroles et quelques admonestations macroniennes.

Erdogan tentait par cette visite de restaurer un peu son crédit et ses relations avec les dirigeants de l’Union européenne. Rencontrer Macron n’était pour lui qu’un deuxième choix par rapport à une visite en Allemagne, d’un poids supérieur au sein des Vingt-Huit mais hors d’actualité étant donné les envolées colériques d’Erdogan à l’égard d’Angela Merkel et la fraîcheur des relations entre les deux gouvernements.

La sempiternelle question de l’entrée de la Turquie dans l’UE, repoussée depuis des années, n’a été évoquée que pour la forme, l’important pour Erdogan étant de renouer quelques fils de sa diplomatie. Les rôles semblant distribués à l’avance, le chef de l’État turc a rétorqué à un journaliste de France 2, suggérant l’existence de livraisons d’armes à Daech par son gouvernement : « Tu ne parles pas comme un journaliste, tu parles comme un membre du Fetö », autrement dit un partisan de Fethullah Gülen, l’ex-rival d’Erdogan accusé par ce dernier d’avoir fomenté le coup d’État manqué de juillet 2016. En réponse aux allusions concernant les milliers d’opposants limogés et emprisonnés, Erdogan a renvoyé sarcastiquement à « l’indépendance de la justice turque », dont ces derniers ont déjà pu mesurer le dévouement au dictateur.

En fait, derrière les mots creux de Macron, la prétendue coopération « stratégique et de qualité » dans la « lutte contre le terrorisme » n’est qu’une façon de maintenir de bonnes relations avec la Turquie. Macron vise là un objectif crapuleux. Rempart contre l’arrivée quotidienne de réfugiés en Europe par les côtes grecques, depuis le scandaleux pacte migratoire de mars 2016, la Turquie devrait continuer à jouer ce rôle de filtre, en échange d’un soutien financier de trois milliards d’euros renouvelables, dont Erdogan regrette de n’avoir reçu qu’un maigre tiers. Et il est vrai que le pays héberge 3,5 millions de réfugiés syriens que les grands pays riches de l’Ouest européen, la France en particulier, n’acceptent pas d’accueillir, au point de payer Erdogan pour qu’il les garde.

Macron a bien sûr déclaré qu’il avait incité Erdogan à se montrer plus démocrate. En réalité, il a surtout montré quelle complicité étroite lie le régime autoritaire de ce dernier à celui de la bourgeoisie française.

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