Corse : le dérivatif nationaliste06/12/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/12/2575.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Corse : le dérivatif nationaliste

Dimanche 3 décembre, les électeurs de toute la Corse ont voté pour élire la future Collectivité unique née de la fusion de la région et des deux conseils départementaux, Haute-Corse et Corse-du-Sud. Lors du premier tour, le taux d’abstention a été de 54,25 %. La liste de Macron stagne à 11,26 %. Dans l’île, la tendance à l’abstention, ajoutée au discrédit national de la gauche et de la droite, a favorisé nettement la coalition des nationalistes et des autonomistes.

Une liste commune PCF-Insoumis s’était constituée, qui a obtenu 5,68 % des voix. Elle a carrément été désavouée par le dirigeant des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon, en ces termes : « En Corse, le dégagisme c’est Simeoni. Bravo ! Macron sévèrement puni. Le FN ridiculisé. L’usurpation d’identité et la tambouille du PCF ont été durement sanctionnées. » Un Mélenchon en est donc au point de trouver la tambouille des nationalistes plus juste que celle de ses proches !

En fait de dégagisme, la coalition nationaliste de Jean-Guy Talamoni et de Gilles Simeoni a obtenu 45,36 % des voix. Cela sur un programme qui mettait en exergue la langue corse, le statut de résident et l’amnistie pour les prisonniers nationalistes, ainsi qu’« un plan de soutien aux entreprises et aux acteurs économiques : un plan d’urgence pour les TPE, la mise en œuvre d’un nouveau système de transport et la fin des grèves à répétition ». Il s’y ajoute la demande de nombreuses mesures d’aides de l’État français et de l’Europe. Les dirigeants nationalistes se gardent d’ailleurs de parler d’indépendance, sauf peut-être dans dix ou vingt ans. En attendant, ils veulent surtout recevoir des aides, qui iront bien sûr au patronat local bien plus qu’elles ne profiteront à la population.

L’île souffre des mêmes maux que les régions les plus pauvres du pays, encore aggravés par l’insularité et la politique de l’État.

Ainsi les salaires des employés des grandes surfaces franchisées sont bas, très bas, alors que les prix sont bien supérieurs à ceux du continent. Les milliers d’emplois saisonniers liés au tourisme ne permettent pas de vivre correctement douze mois sur douze.

Les hôpitaux sont dans un état critique, tant du fait du manque de personnel que du point de vue matériel. Passer un simple scanner relève du parcours du combattant. Bien souvent, suivre un traitement nécessite d’aller à Marseille ou à Nice.

Les chemins de fer sont dans un tel état qu’il faut pallier souvent leur défaillance par des relais en bus. En dehors de quelques grands axes, la règle est l’étroitesse des routes et leur mauvais état. Dans certains villages de montagne, le ravinement ne peut être comblé que grâce à la bonne volonté des habitants. En cas de chutes de neige, bien des routes sont impraticables. Cela a servi d’ailleurs d’explication pour le taux d’abstention.

Si le programme de la coalition nationaliste fait mention des difficultés propres à l’île, les solutions proposées ne diffèrent pas de la politique d’un Macron, pour qui la lutte contre le chômage consiste en aides aux patrons. La priorité donnée aux résidents pour l’emploi ne résoudrait pas plus qu’ailleurs la question du chômage. Elle n’aurait pour résultat que de créer des divisions entre les différentes catégories de travailleurs. Au fond, les nationalistes la mettent en avant précisément dans ce but.

La langue corse mise à toutes les sauces sert à afficher une unité factice qui ne dissimule pas l’opposition bien réelle entre les travailleurs et les patrons. En effet qu’y a-t-il de commun entre le petit retraité vivant chichement et dont la pension est si faible que la moindre dépense lui apparaît exorbitante, l’employée de supermarché tirant le diable par la queue et le riche conducteur de 4x4 patron du BTP, surexploitant et insultant ses ouvriers immigrés, ou le dirigeant d’une prospère franchise avec de nombreux employés ?

Même si bien des jeunes ont pu se croire représentés par les nationalistes, leur avenir, comme celui des travailleurs de Corse, ne peut passer que par la transformation révolutionnaire de toute la société. Ce que seuls les travailleurs peuvent faire, quelle que soit la langue dans laquelle ils s’exprimeront.

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