Prud’hommes désertés : une loi faite pour les patrons05/07/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/07/2553.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Prud’hommes désertés : une loi faite pour les patrons

Plusieurs conseils de prud’hommes ont vu le nombre d’affaires nouvelles chuter de manière spectaculaire. Par exemple, celui de Seine-Saint-Denis, à Bobigny, le deuxième de France, a supprimé, trois audiences de conciliation en mai dernier… faute d’affaires à traiter.

Cette situation est générale. Au 1er ­trimestre 2017, les conseils de prud’hommes dépendant de la cour d’appel de Paris, soit l’ensemble de l’Île-de-France, ont enregistré une diminution de 42 % du nombre d’affaires nouvelles par rapport au premier trimestre 2016. À l’échelle du pays, le ministère refuse de donner des chiffres, mais la baisse se situerait autour de 30 %.

La principale raison est la complexité introduite en 2015 par la loi sur la croissance et l’activité, dite loi Macron, du temps où celui-ci sévissait comme ministre de l’Économie. Cette loi a réformé le système prud’homal, prétendument pour le rendre plus efficace. Mais elle a rendu pour les salariés le dépôt d’un dossier beaucoup plus compliqué. En effet, préalablement à tout dépôt de dossier, un nouveau formulaire de sept pages, complexe et très détaillé, doit être rempli. Il est obligatoirement accompagné d’un exposé des motifs de la demande et de l’ensemble des pièces justificatives : fiches de paye, contrat de travail, témoignages écrits, demandes chiffrées, etc.

Cette nouvelle procédure tranche totalement avec l’ancienne, où un formulaire succinct d’une seule page, simple à remplir en cochant une série de cases, suffisait au salarié pour déposer sa plainte. Elle était conçue pour qu’un salarié, sans l’aide de spécialiste, avocat ou autre, puisse entamer la procédure contre son patron. Si la loi a voulu décourager une partie des salariés de se tourner vers les prud’hommes, elle a réussi.

Dès le mois suivant son entrée en vigueur, le 1er août 2016, le nombre d’affaires nouvelles à Bobigny s’écroulait : 80 contre 267 un an auparavant. Tous les jours, des salariés se découragent au vu de la liasse, des membres du greffe en témoignent.

Évidemment, un rapport officiel et les partisans de Macron invoqueraient d’autres causes : l’augmentation des ruptures conventionnelles, les délais de prescription réduits, l’appel de plus en plus fréquent à un avocat... Ils prétendent que le but de la loi n’était pas de réduire le nombre de dossiers, mais de les accélérer. C’est un mensonge pur et simple ; quant au délai moyen pour traiter une affaire, il est toujours d’environ 22 mois.

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