Loi antiterroriste : vers l’état d’urgence permanent28/06/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/06/2552.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Loi antiterroriste : vers l’état d’urgence permanent

Le gouvernement vient de prolonger l’état d’urgence pour la sixième fois depuis le 13 novembre 2015. Cette fois serait la dernière, puisque l’ensemble des mesures qu’il permet, et donc censées jusque-là être exceptionnelles, devraient se retrouver dans une nouvelle loi dite antiterroriste.

Les préfets et le ministère de l’Intérieur auront ainsi toute latitude pour fermer des lieux de culte, désigner des périmètres de protection dans lesquels la fouille sera obligatoire, assigner des individus dans un périmètre géographique déterminé ou perquisitionner toute personne censée représenter une menace pour la sécurité ou l’ordre public. Le gouvernement en profiterait aussi pour faire passer le PNR (Passenger name record), un fichier contenant les informations sur tous les passagers aériens et autoriser les écoutes hertziennes, notamment des communications par téléphone mobile.

Avec cette loi, les autorités pourront se passer d’un juge, dans la plupart des cas. Et si les perquisitions administratives et l’exploitation des données informatiques saisies devront être soumises à un juge des libertés et de la détention, cela ne risque pas de freiner beaucoup le zèle policier : une disposition similaire existe déjà actuellement et les juges l’ont accordé dans 90 % des cas.

Les assignations seront renouvelables… indéfiniment. Les assignés pourront porter un bracelet électronique, alors que jusqu’ici seuls ceux ayant eu une condamnation pour crime ou délit terroriste pouvaient y être soumis.

La notion même de terroriste sera élargie : seront visés non seulement les personnes soupçonnées de préparer des attentats, mais leur entourage. Et qui sera qualifié de terroriste ? Les inculpés de l’affaire de Tarnac en avaient été eux aussi accusés en 2008, avant que cette qualification soit retirée… huit ans plus tard. On imagine le large usage qu’un préfet pourrait faire d’une définition aussi vague pour désigner des militants syndicaux occupant leur usine ou séquestrant leur directeur.

Comme aujourd’hui avec l’état d’urgence, les seuls recours prévus par le gouvernement seront après coup. Un militant assigné chez lui pendant une manifestation, comme on l’a vu au moment de la mobilisation contre la loi travail, pourra donc contester la décision le concernant… une fois la manifestation passée.

Un rapport parlementaire de décembre 2016, faisant le bilan d’un an d’état d’urgence, soulignait ainsi qu’aucune procédure judiciaire n’avait été ouverte à l’encontre des 95 personnes alors assignées à résidence, dont la moitié l’étaient depuis un an.

Sous prétexte de lutter contre le terrorisme, le gouvernement pérennise ainsi l’état d’urgence, s’épargnant des polémiques tous les six mois lors de son renouvellement. Contre les attentats terroristes, cela ne sert à rien. Mais cela permet à Macron et à Collomb d’avoir l’air de faire quelque chose pour protéger la population. Et puis, contre d’éventuelles contestations, cela peut toujours servir.

Partager