Espagne : grève dans les ports21/06/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/06/2551.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Espagne : grève dans les ports

Depuis le début de l’année, les travailleurs des ports espagnols se battent pour conserver leur statut et les protections sociales qui y sont liées. Ils ont fait plusieurs journées de grève, très suivies. Le 19 juin, tous les ports du pays étaient quasiment arrêtés.

Les dockers se préparent à de nouvelles grèves les 21 et 23 juin et ils attendent le soutien des travailleurs des ports de toute l’Europe pour un débrayage le 29 juin. En Espagne, comme dans bien des ports de par le monde, les dockers avaient obtenu une organisation protégeant leur embauche. Pendant des siècles, de Barcelone à Shanghai et du Havre à Valparaiso, il suffisait de se présenter sur un port pour se retrouver des heures durant avec un sac sur le dos et, le soir, trois sous en poche, à peine de quoi survivre jusqu’au lendemain. La concurrence entre travailleurs misérables était féroce, les conditions de travail sauvages, la mortalité effrayante.

Il a fallu aux travailleurs des ports des batailles épiques pour imposer un statut de docker, l’obligation faite aux patrons d’embaucher sous ce statut et de respecter le salaire et les conditions de travail définis. Bien souvent, ce sont les organisations syndicales elles-mêmes qui réglementaient l’embauche. Cette organisation est, depuis une trentaine d’année, systématiquement attaquée par le patronat et ses représentants. Les travailleurs ont partout été contraints de reculer.

En Espagne, le Parlement a voté le 18 mai une loi remettant en cause les Sociétés de gestion des travailleurs portuaires (Sagep) par lesquelles les patrons sont obligés de passer pour embaucher des dockers. En finir avec les Sagep signifierait licencier les 6 000 dockers, puis les réembaucher au coup par coup, suivant les besoins, à des conditions négociées port par port, voire, comme à l’ancien temps, bateau par bateau.

Devant la colère des travailleurs, le gouvernement de droite s’est réfugié derrière la volonté de la Commission européenne. Il est exact que cette dernière exige l’alignement du statut des dockers espagnols sur celui, partout en recul, de leurs camarades européens. De plus la Commission menace l’Espagne de fortes amendes si elle n’abolit pas les Sagep. Il s’agit de faire faire des économies aux grandes compagnies maritimes dont les marchandises, spécialement les conteneurs, transitent par quelques ports géants, dont Algésiras, Valence et Barcelone, en Espagne. Le gouvernement espagnol s’est bien volontiers plié aux ordres du grand patronat international, via la Commission européenne, et aux désirs du patronat local, avide de profiter de l’occasion. Il a même proposé de payer les primes de licenciement des dockers et la mise à la retraite avec 70 % du salaire de ceux qui ont dépassé 50 ans.

Les dockers ont refusé tout net. Non seulement ils n’acceptent pas que l’État paye avec de l’argent public ce qui devrait être à la charge du patronat, mais surtout ils refusent de sacrifier les nouvelles générations de travailleurs. Ils exigent donc la garantie d’emploi à 100 %, c’est-à-dire le maintien de leur statut.

La presse et le gouvernement affirment que ce mouvement a déjà fait perdre 150 millions d’euros à l’économie espagnole, c’est-à-dire aux patrons. Et ce n’est sans doute pas fini ! La détermination des dockers peut être contagieuse, tant parmi les autres travailleurs d’Espagne que parmi les autres travailleurs des ports.

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