Tunisie : l’armée contre les chômeurs17/05/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/05/2546.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Tunisie : l’armée contre les chômeurs

L’armée est intervenue le 16 mai dans le désert de Kébili, dans le Sud tunisien. Depuis plusieurs semaines, en effet, des manifestations et mouvements de protestation de chômeurs ont eu lieu autour des installations pétrolières Perenco et Winstar, bloquant la production, ainsi qu’autour du gazoduc d’El Golâa.

L’intervention fait suite à une décision du président Essebsi qui, dans un discours, promettait que l’armée « protégerait les outils de production »… des protestations de la population pauvre. D’après lui, en effet, « toutes les protestations ne sont pas légitimes ». Pas légitime, la colère des chômeurs, des jeunes diplômés dont près de la moitié ne trouvent aucun emploi ? Pas légitime, l’inquiétude des mères de famille qui voient le pouvoir d’achat baisser de 15 % en deux ans, l’inflation rogner les ressources, alors que le gouverneur de la Banque centrale aurait triplé son propre salaire depuis sa nomination en 2013 ?

Les sit-in et blocages qui se sont enchaînés depuis plusieurs semaines dans le centre et le sud du pays, dans la région de Tataouine, avaient finalement incité des ministres, dont le Premier, Youssef Chahed, à se déplacer et à faire… pas moins de 64 promesses, créations d’emplois dans les administrations et les services, amélioration des conditions de vie des villageois, déblocage d’aides publiques prises sur le bénéfice du pétrole et du gaz. Mais les collectifs de « sit-inneurs », habitués aux promesses non tenues depuis des années, avaient appelé à une journée de grève à Tataouine fin avril, rejointe par les salariés des écoles et des services publics. D’autres journées de grève et de blocage de la route venant de la frontière libyenne avaient été organisées sur d’autres villes, pour exiger, en particulier, une embauche dans chaque famille.

La réponse du pouvoir à la population pauvre est claire : il y a d’un côté le projet de loi dit de « réconciliation économique » visant à amnistier les hommes d’affaires ou anciens cadres du régime de Ben Ali impliqués dans des affaires de corruption, prétendument en vue d’« encourager les investissements » et de « débloquer l’administration ». De l’autre, le pouvoir envoie l’armée pour faire taire les chômeurs.

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