Editorial

Fillon, dans la course pour servir les riches

Fillon, dans la course pour servir les riches

Fillon a donc été choisi par l’électorat de droite, souvent bon chic bon genre, parfois vieille France, toujours bien-pensant. Il n’y avait, sur le fond, aucune différence avec Juppé, deux candidats qui ont gouverné ensemble par le passé.

Fillon promet maintenant de faire pire que depuis trente ans. Il prend pour modèle Thatcher, cette chef du gouvernement britannique qui, dans les années 1980, mena une guerre hargneuse contre ceux qu’elle appelait les ennemis de l’intérieur : les travailleurs et leurs organisations.

Fillon promet, lui aussi, une saignée aux classes populaires. Il dénonce le chômage, mais veut supprimer 500 000 emplois de fonctionnaires, c’est-à-dire tailler dans les effectifs des écoles, des hôpitaux, des crèches et des bibliothèques de quartier. Oh, les riches ne seront pas gênés, eux qui ont leurs domestiques, leurs cliniques privées et qui, comme Fillon, mettent leurs enfants dans des écoles privées huppées. En revanche, la vie sera plus difficile pour les habitants des villes et des quartiers populaires, et pour ceux des campagnes.

Fillon veut supprimer les 35 heures. Pour fixer la durée du travail, les patrons auraient toute latitude : dans chaque entreprise, ils pourraient faire un chantage aux licenciements pour imposer une hausse, avec 48 heures comme seul plafond, et sans que les salaires suivent.

Fillon veut reporter l’âge de la retraite à 65 ans, dérembourser une grande partie des soins, démanteler le Code du travail. Le député du très chic 7e arrondissement de Paris veut faciliter les licenciements et réduire les allocations chômage. Il veut augmenter de 2 % la TVA, l’impôt le plus injuste. Il veut restreindre le regroupement familial des travailleurs étrangers, lui, le soi-disant grand défenseur de la famille. Aux salariés et aux chômeurs, il promet du sang et des larmes.

Mais quand il s’adresse aux riches, le père Fouettard se transforme en père Noël : suppression de l’impôt sur la fortune, baisse de l’impôt sur le revenu pour les plus riches, baisse de 40 milliards des charges patronales, transfert d’une partie de l’Assurance-maladie aux assureurs privés. Son amie, c’est la finance !

Ses positions contre l’IVG et le mariage homosexuel sont bénies par tout ce que le pays compte de grenouilles de bénitier.

Fillon a été ministre de Chirac, puis le Premier ministre de Sarkozy de 2007 à 2012. Depuis, c’est la gauche qui a mené une politique de droite : un million de chômeurs en plus, les accords de compétitivité, la loi Macron, la loi El Khomri… Le PS a ainsi préparé le terrain pour une politique encore plus antiouvrière. Après cinq ans au service du patronat, Valls et Hollande sont rejetés par ceux-là mêmes qui les ont élus, mais veulent rempiler pour continuer la même politique.

Le Pen redoute maintenant que ses électeurs aillent vers Fillon, comme ceux de son père avaient voté Sarkozy. En effet, bien malin qui pourrait dire lequel, de Fillon ou de Le Pen, a le programme le plus réactionnaire. Le Pen misera sur le fait que, comme Trump aux États-Unis, elle n’a jamais été associée au pouvoir. Mais, comme le cas de Trump le montre bien, cela n’empêche pas d’être un serviteur dévoué à la classe capitaliste.

Quand ils étaient au pouvoir, Fillon et ses comparses n’ont pas osé prendre les mesures qu’il propose aujourd’hui, car ils craignaient les réactions des travailleurs et ils n’avaient pas tort. De Gaulle, le modèle de Fillon, dut en rabattre devant la grève générale de mai-juin 1968. Juppé, en 1995, remballa sa réforme de la Sécurité sociale et des retraites. Villepin, en 2006, dut enterrer le CPE, qui visait à précariser encore plus les jeunes.

Aujourd’hui, Fillon espère que l’élection lui donnera les coudées franches contre la classe ouvrière. Mais, s’il est élu, elle n’aura aucune raison d’accepter les coups qu’il voudra lui porter. Elle aura encore toutes ses armes pour réagir, avec grèves et manifestations de masse, contre les attaques du grand patronat et du gouvernement.

Puisque les élections en fourniront l’occasion, les travailleurs doivent exprimer leur rejet de toute politique anti­ouvrière, quel que soit le futur président. Avec la candidature de Nathalie Arthaud, portée par Lutte ouvrière, ils pourront dire qu’ils n’acceptent ni la hausse du temps de travail et du coût de la vie, ni la baisse des salaires, ni l’accroissement de l’exploitation. Face aux politiciens qui veulent gouverner pour le grand patronat et les banquiers, ils devront exprimer un vote conscient, lucide, pour affirmer leurs intérêts de classe et faire entendre le camp des travailleurs.

Éditorial des bulletins d’entreprise du 28 novembre 2016

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