Ukraine : la misère avec ou sans visa26/10/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/10/2517.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Ukraine : la misère avec ou sans visa

Le Parlement européen devrait bientôt accorder aux Ukrainiens le droit de se rendre à l’Ouest sans visa alors que, depuis une décennie, les ressortissants de l’Union européenne (UE) peuvent aller en Ukraine sans formalités spéciales. La fin d’une inégalité de traitement ? Peut-être, mais elle risque d’avoir un goût amer.

Un sondage, que des médias d’Ukraine viennent de publier, indique que 30 % des habitants de ce pays voudraient le quitter définitivement. Et 40 % voudraient aller travailler à l’étranger, faute de pouvoir « mener une vie décente » sur place. Seuls 28 % des sondés excluent d’émigrer. Ils étaient plus du double à le faire début 2014, lors de la chute du régime honni de Ianoukovitch.

En 2015, malgré l’obligation de visa, plus de neuf millions d’Ukrainiens (sur une population totale de 45 millions !) avaient déjà franchi la frontière avec la Pologne. Plusieurs millions encore sont allés travailler dans un autre État membre de l’UE ou en Russie. Ils n’arrivaient plus à vivre dans un pays où « les salaires moyens sont deux fois moins élevés qu’en Chine », selon un intervenant au Forum économique international de Kiev, début octobre.

Ce Forum a souligné que, malgré ces salaires de misère, les « investisseurs » étrangers ne se précipitent pas en Ukraine : ils y sont proportionnellement cinq fois moins nombreux qu’en Pologne, dix fois moins qu’en Estonie, deux pays voisins. À leurs réticences, ils donnent comme principale raison, avant la guerre dans l’Est, la corruption effrénée de l’appareil d’État ukrainien.

Mais si les hommes d’affaires occidentaux préfèrent éviter cette bureaucratie mafieuse, les travailleurs ukrainiens ne peuvent échapper à sa rapacité. Pour ceux qui en ont les moyens, il reste possible de chercher à émigrer. Mais c’est pour venir partager le sort que les mêmes capitalistes réticents à les exploiter en Ukraine, ou leurs pareils, réservent, à l’ouest du continent, aux classes laborieuses de toutes origines.

Il y a trois ans, au début de la contestation du régime du pro-russe Ianoukovitch, certains manifestants arboraient une casserole sur la tête, en protestation contre la corruption qui les empêchait de vivre. Depuis, un régime tout aussi pourri que le précédent s’est mis en place. Il y a peu, son président, le pro-occidental Porochenko, a affirmé que l’exemption de visa à venir résultait de ce qu’il avait tenu ses engagements à l’égard de l’Union européenne. Visiblement, remplir la marmite des classes populaires ne figurait pas parmi ses engagements.

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