Camp de Rivesaltes : mépris et violence d’État contre les réfugiés21/10/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/10/2464.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Camp de Rivesaltes : mépris et violence d’État contre les réfugiés

Venu inaugurer le Mémorial du camp de Rivesaltes le 16 octobre, Valls a prononcé un discours pour évoquer un « lieu de mémoire » contre l’antisémitisme, le racisme et la haine. Mais il s’est bien gardé de rappeler que c’est l’État français qui a fait preuve de mépris, de brutalité contre des réfugiés et des étrangers, comme en témoigne l’histoire du camp de Rivesaltes.

Le camp de Rivesaltes, ouvert en 1939 sur 600 hectares, avait été construit à des fins militaires. Mais, une partie des baraquements furent utilisés comme lieu d’internement à partir de 1941.

Les premiers internés de Rivesaltes furent des réfugiés espagnols qui avaient fui les armées de Franco. Ils avaient d’abord, avec des dizaines de milliers de leurs compatriotes, été parqués sur les plages des Pyrénées-Orientales au début de l’année 1939. Par la suite, des milliers d’entre eux, souvent militants socialistes, communistes ou anarchistes, furent emprisonnés dans les camps du Vernet, de Gurs ou de Rivesaltes. C’était là l’œuvre du régime de Pétain, mais la politique d’internement avait commencé sous la IIIe République. Un certain nombre de ces internés furent livrés à la Gestapo.

Rivesaltes fut intégré dans le réseau des camps de concentration (c’était le terme assumé à l’époque) en France. Les camps s’étaient ouverts après l’adoption de la loi sur les « étrangers indésirables » de 1938. Avec la guerre, les dispositions s’appliquèrent contre des Allemands, souvent Juifs et exilés de l’Allemagne hitlérienne, parce qu’ils étaient « ressortissants d’une puissance ennemie ». En 1942, le camp de Rivesaltes fut utilisé pour enfermer les Juifs étrangers dont Vichy avait ordonné l’arrestation en zone dite libre. Rivesaltes devint alors le « Drancy du sud de la France », selon l’expression de Serge Klarsferd.

Les Tziganes, victimes de la politique de Vichy, y furent aussi internés par milliers et déportés vers Auschwitz. La nationalité française de la plupart d’entre eux ne les avait aucunement protégés.

Pendant la guerre d’Algérie, Rivesaltes servit à interner des membres liés au FLN. Puis, en 1962, des milliers de harkis – ces troupes de supplétifs algériens utilisés par l’armée française – et leurs familles y furent regroupés dans des conditions tout aussi déplorables. Enfin, entre 1985 et 2007, le camp fut utilisé comme centre de rétention d’immigrés.

L’histoire du camp de Rivesaltes montre toute l’hypocrisie du discours sur la France « terre d’accueil », la France « patrie des droits de l’homme ». Valls, qui organise aujourd’hui la traque des sans-papiers, avait vraiment toute sa place à l’inauguration de ce mémorial… dans la continuité de tous les dirigeants politiques qui se sont servis du camp de Rivesaltes.

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