Brésil : grèves et manifestations03/06/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/06/2444.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil : grèves et manifestations

Vendredi 29 mai, à l’appel de six confédérations syndicales, le travail a cessé dans certaines grandes entreprises du Brésil. De nombreuses universités ont été paralysées. Des rassemblements ou des manifestations ont occupé les places et les avenues des grandes villes, en particulier à Sao Paulo, la capitale économique du pays.

Même la Centrale unique des travailleurs (CUT), principale confédération, proche du Parti des travailleurs et de la présidente Dilma Rousseff, avait signé cet appel contre la politique d’un gouvernement qu’elle soutient pourtant. Les attaques sont-elles trop graves pour que la CUT reste étrangère aux protestations ? Le PT lui-même a voté contre certaines mesures proposées par un gouvernement qu’il dirige. La seule centrale à rester hors du mouvement a été Força sindical, liée à l’opposition de droite, qui bien sûr appuie toutes les mesures antiouvrières.

D’abord, un projet de loi sur la sous-traitance est en train d’être adopté. Il modifie en profondeur le droit du travail. Jusqu’ici, on ne pouvait sous-traiter que les activités annexes d’une entreprise, comme le ménage ou le gardiennage, mais pas l’activité de base : la production dans une usine, la caisse ou les guichets dans une banque. Il n’y aurait désormais plus de limite à la sous-traitance, y compris en cascade, c’est-à-dire pas de limite à l’irresponsabilité des patrons.

C’est légaliser la précarité, alors que les travailleurs brésiliens ne restent en moyenne pas plus de deux ans dans la même entreprise. C’est une menace contre le treizième mois, les vacances, les repos payés, les heures supplémentaires payées. La santé au travail est menacée : huit accidents du travail sur dix se produisent aujourd’hui dans la sous-traitance. Les salaires baisseront : les travailleurs de Petrobras, la compagnie pétrolière nationale, touchent en moyenne un salaire triple de celui des nombreux travailleurs de la sous-traitance. Cela favorisera aussi la division syndicale : les sous-traitants ne faisant pas partie de l’entreprise, rien n’empêche qu’ils aient un syndicat différent des autres travailleurs, voire un syndicat maison créé par le patron.

Deux autres mesures ont révolté les salariés. Le gouvernement a réduit l’accès à la pension de réversion à laquelle avaient droit la veuve, le veuf ou les enfants mineurs d’un salarié disposant d’un contrat de travail régulier, ce qui est loin d’être toujours le cas. Il a aussi passé de six à douze mois le temps de présence nécessaire dans l’entreprise pour avoir droit à une indemnité de chômage. Or le chômage augmente : le pays est maintenant touché par la baisse du prix des matières premières, par l’entrée en crise de la Chine, son premier partenaire commercial, et 100 000 postes de travail ont disparu en avril.

Enfin, le gouvernement vient de décider 25 milliards d’euros de coupes budgétaires pour l’année en cours. Plus de la moitié concernent les budgets sociaux : santé, logement, éducation. La population laborieuse sera la première victime de ces réductions. Certaines ont parfois été anticipées : en 2014, le Système unique de santé (l’assurance-maladie) a économisé 3 milliards d’euros, un dixième de son budget prévisionnel, réduisant travaux et équipements.

Les raisons de mécontentement ne manquent pas aux travailleurs brésiliens. Mais, pour faire reculer le gouvernement et les patrons, il faudra une lutte massive et déterminée, comme celle qui en 2013 a fait annuler les hausses des transports dans les grandes villes.

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