Goodyear, Amiens : Le patron prend 1 200 familles de salariés en otages09/01/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/01/une2371.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Goodyear, Amiens : Le patron prend 1 200 familles de salariés en otages

Le DRH et le directeur de la production ont été retenus dans l'enceinte de l'usine Goodyear d'Amiens une trentaine d'heures par quelque deux cents salariés. La direction refusait de reprendre les négociations sur des indemnités de licenciements, bien moins favorables que celles proposées il y a deux ans. Désormais, seulement 1 500 euros par année d'ancienneté sont proposés.

Les ouvriers de Goodyear ont résisté sept années à la lutte d'usure que leur a menée la direction : le chantage du « soit une augmentation de la productivité, soit les licenciements », les campagnes de dénigrement et les procès contre les syndicalistes accusés d'être les responsables de la fermeture annoncée du site, l'épée de Damoclès suspendue sur chacun des 1 170 salariés. À présent, pour ceux-ci, l'espoir d'une issue favorable s'envole. Toutes les stratégies judiciaires mises en place par la CGT depuis un an (jugements, référés, appels) ont été systématiquement perdues. Les tribunaux ont validé le plan « social » de la direction et les lettres de licenciement devraient être envoyées courant janvier.

La direction a condamné la « violence » du procédé employé par les salariés excédés. Ces derniers dénoncent la violence des « patrons voyous » qui jettent à la rue près de 1 200 salariés et plus de 2 000 employés de la sous-traitance. Des patrons qui ont exposé leurs ouvriers à des produits cancérigènes pendant des années, comme l'ont récemment mis en évidence les syndicats.

« On sait que c'est foutu, alors on se bat pour l'argent », résume l'un des salariés. Ils réclament un congé de reclassement de 24 mois et « au moins 80 000 euros pour tout le monde, plus les années d'ancienneté ». Une somme plus que raisonnable au regard des dizaines d'années d'exploitation subies par la majorité des ouvriers de l'usine et les profits de cette énorme multinationale. Rien que la vente des deux cent quarante et un mille pneux stockés sur place (en bonne partie d'énormes pneux agricoles) y pourvoierait.

Comme le dénonce la CGT, « l'État a mis tout son poids au service de Goodyear », alors que Montebourg et Hollande se sont déplacés sur le parking de l'usine lors de la campagne présidentielle pour promettre une loi contre les licenciements. Les salariés sont d'autant plus amers à leur égard que, non seulement ils n'ont bien sûr pas fait voter une telle loi, mais qu'au lieu de cela ils ont mis en place l'ANI qui favorise les licenciements. Dernièrement, c'est la députée socialiste locale qui a tenté de lanterner les ouvriers en présidant pendant des mois une commission d'enquête parlementaire censée soi-disant faire la lumière sur la validité du plan de fermeture. Dans le même temps, le gouvernement faisait systématiquement intervenir les CRS contre les salariés manifestant pour s'opposer à leurs licenciements, et quatre d'entre-eux doivent encore passer en procès en février. Accusés de violence contre la police, ils risquent jusqu'à trois ans de prison.

Les ouvriers ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Les patrons auraient aimé pouvoir les mettre dehors de l'usine sans résistance. La direction évoque à présent une fermeture précipitée du site. C'est sans compter sur la combativité des travailleurs. Le dépôt des pneus continue d'être bloqué et les salariés sont invités à continuer, même après l'arrivée des lettres de licenciement, à venir à l'usine pour l'occuper. « Vous voulez votre usine et le stock », a déclaré le responsable de la CGT, « donnez-nous des indemnités à la hauteur du préjudice. »

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