Kem One : Le coup de semonce des travailleurs a payé18/12/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/12/une2368.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Kem One : Le coup de semonce des travailleurs a payé

Mercredi 11 décembre, les travailleurs de l'ensemble des sites Kem One, à Saint-Fons, Balan, Fos et Lavera, ont décidé de se mettre en grève reconductible et d'occuper leurs entreprises.

Kem One est l'ex-pôle vinylique (PVC) d'Arkema, lui-même issu de Total en 2006. L'entreprise a été placée en redressement judiciaire, il y a six mois, après que son acquéreur Gary Klesch, un habitué des coups tordus, eut vidé toute sa trésorerie dans des comptes à l'étranger. À plusieurs reprises, le tribunal de commerce de Lyon a repoussé la date limite, pour que des repreneurs se fassent connaître. Une nouvelle audience était prévue jeudi 14 décembre.

Mais, quelques jours avant cette nouvelle échéance, les conditions de reprise n'étaient pas réglées. Il y avait même un fort doute sur le fait que les deux repreneurs restant en lice aient pu réunir les financements nécessaires, et il y avait la certitude que le gouvernement n'a pas fait quoi que ce soit pour obliger Arkema à conserver Kem One, ou à réintégrer les salariés dans le groupe en cas de fermeture. Aucun accord n'avait été finalisé pour l'apurement des dettes aux fournisseurs et des dettes sociales. Il n'y avait pas non plus de contrat finalisé et signé sur les prix de fourniture des fluides (éthylène, vapeur) ou de l'énergie (gaz, électricité).

Dans ces conditions, les travailleurs de Kem One craignaient que le tribunal de commerce prononce la liquidation judiciaire de l'entreprise, ou repousse une nouvelle fois les échéances. À une très grande majorité, ils ont donc décidé de se mettre en grève et d'occuper les sites.

Un grand nombre d'entre eux avaient le sentiment qu'on les menait en bateau depuis plusieurs mois. Ils exprimaient aussi un fort ressentiment vis-à-vis du gouvernement, et en particulier du ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, accusé de n'avoir pas fait grand-chose pour régler la situation de Kem One. D'autres disaient qu'ils « avaient été trop gentils jusque-là ! »

À Saint-Fons, les grévistes se sont installés aux entrées, avec des feux de palettes pour se réchauffer et de pneus pour se faire voir de loin. Ils ont interdit l'accès de l'usine à la direction et aux non-grévistes et ont bloqué l'accès à la cantine, estimant qu'il n'y avait aucune raison pour que la direction et les non-grévistes puissent s'y mettre au chaud, alors que les grévistes, eux, étaient dehors !

Le préfet du Rhône y a été de sa diatribe contre les grévistes n'estimant « d'aucune utilité » le blocage des sites. Évidemment, ce n'est pas lui qui risque de perdre son emploi. Il a d'ailleurs été démenti par les événements, puisqu'en moins de 48 heures les principaux points de blocage ont été levés. Des solutions ont été trouvées pour les diverses créances de Kem One, des contrats fournisseurs ont été revus à la baisse pour les fluides et l'énergie. Et le tribunal a programmé de nouvelles audiences les 18 et 20 décembre, pour finaliser les procédures juridiques et faire le choix du repreneur. Les emplois devraient être préservés, sauf ceux prévus dans le plan de l'actuelle direction. Ceux-ci devraient se faire sous forme de départs volontaires et de mutations dans le groupe Arkema.

Les travailleurs ont donc décidé de suspendre la grève. La vigilance reste cependant de mise. La principale crainte concerne les repreneurs. L'un, le groupe Open Gates, présente un montage financier surprenant, voire inquiétant. Quant au deuxième, il ne semble pas avoir des finances très solides. Alors, il ne faudrait pas que les travailleurs de Kem One se retrouvent devant un deuxième Klesch.

Les travailleurs ont montré que leur détermination a été efficace, puisqu'ils ont obligé les pouvoirs publics tout comme Arkema ou Total à trouver des solutions. À l'occasion de ce conflit, des liens se sont créés entre grévistes, en particulier entre postés et salariés de jour. Et cela aussi comptera pour l'avenir.

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