Leur société

Fraude patronale : Un pactole de 32 milliards

32 milliards d'euros par an : voilà le manque à gagner de l'État français en matière de TVA ou, plus exactement, ce que le patronat petit et gros ne lui reverse pas au titre de la TVA, révèle un rapport de la Commission européenne.

Ce rapport montre que la pratique qui consiste, pour des entreprises, à échapper au versement de la TVA par des biais, légaux ou non, est générale dans l'Union européenne. Croissant d'année en année, ce phénomène, s'inquiète la Commission européenne, représente un cinquième des recettes potentielles des États européens, alors que la plupart affichent un trou de plus en plus profond dans leurs recettes publiques.

Les mécanismes de cette fraude gigantesque sont multiples et vont de la petite escroquerie à des systèmes très complexes. Ainsi, avec les règles communautaires s'appliquant au versement de la TVA en cas de vente entre des sociétés de différents pays européens, s'est mis en place un système, dit « carrousel », qui brouille les pistes au fil des passages de frontière. De cette façon, en 2008, une société vendant des téléphones portables, Eurocanyon, qui opérait entre la France, la Grande-Bretagne et le Luxembourg, avait à elle seule soustrait 100 millions d'euros de TVA.

Quant aux grands groupes financiers et industriels, c'est sans risque qu'ils empochent des sommes fantastiques au titre de la TVA. Spécialistes de « l'optimisation fiscale » de leurs activités, ils domicilient filiales et holding en fonction des régimes fiscaux nationaux, dont celui de la TVA, et multiplient les transactions transfrontalières – souvent fictives – en surfant sur les différences de taux de TVA entre les États de l'Union.

Alors, on comprend que Moscovici, ministre français des Finances, ait eu l'air embarrassé à l'annonce du rapport de la Commission sur la fraude en France. Ces 32 milliards sont en effet gênants, en pleine discussion du budget 2014, quand le gouvernement clame qu'il lui faut absolument trouver 15 milliards. Au lieu de vouloir obliger les classes populaires à de nouveaux sacrifices, au nom du « déficit-à-combler », on pourrait se demander pourquoi il ne récupère pas toute cette TVA qu'il laisse filer... dans les poches du patronat ?

En 2012, Jérôme Cahuzac, alors ministre du Budget et grand spécialiste de l'évasion fiscale, annonçait la mise en place d'un « arsenal anti-fraude fiscale ». Il précisait que « l'accent sera mis sur les fraudes de grande envergure, comme les carrousels TVA ». On voit le résultat.

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