Bangladesh : Après l'incendie d'une usine La colère des travailleurs du textile05/12/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/12/une2314.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Bangladesh : Après l'incendie d'une usine La colère des travailleurs du textile

Depuis l'incendie de l'usine textile Tazreen Fashion qui a causé la mort de 112 personnes samedi 24 novembre à Dacca, les manifestations des travailleurs du textile se multiplient dans la capitale du Bangladesh. Vendredi 30 novembre ils étaient plusieurs centaines, et plusieurs milliers le surlendemain, à protester contre leurs conditions de travail dans la zone industrielle où a eu lieu le drame et où sont implantées quelque 300 usines textiles, sur les 4 500 que compte le pays.

Les manifestants réclamaient d'une part le respect de la sécurité dans ces usines où, selon les pompiers, 700 travailleurs ont péri dans des incendies depuis six ans, ainsi que des poursuites contre les responsables du drame. Les rescapés de l'atelier qui a brûlé demandaient en plus que leur soit versé le salaire du mois de novembre ainsi que l'équivalent de quatre mois de salaire, en attendant soit la réouverture de l'usine, soit de trouver un emploi dans une autre entreprise. Avec des salaires mensuels aux alentours de 40 euros, cet argent leur est indispensable pour survivre. La faiblesse des salaires avait d'ailleurs été à l'origine d'une vague de grèves et de manifestations en septembre dernier, inquiétant jusqu'aux donneurs d'ordres des pays riches, puisque même le groupe de mode suédois H&M avait demandé au gouvernement bengladais d'augmenter les salaires, du moins dans les entreprises travaillant pour l'exportation !

Comme elles l'avaient déjà fait l'été dernier, les autorités se sont empressées de fermer les usines environnantes pour tenter de prévenir toute extension de la colère, et ont envoyé les policiers charger les manifestants, ajoutant ainsi des dizaines de blessés aux 150 déjà causés par l'incendie.

La crainte de la colère des travailleurs du textile est encore présente aujourd'hui, puisque le syndicat patronal a annoncé que les familles des victimes seraient indemnisées jusqu'à dix ans de salaire. Trois responsables de l'usine Tazreen Fashion ont été arrêtés, accusés d'avoir ordonné aux ouvriers de rester dans l'usine lors du déclenchement de l'alerte. D'autres charges pèsent aussi sur la direction : l'atelier comptait neuf étages, alors qu'il n'avait reçu une autorisation que pour trois étages, et les trois issues de secours menaient toutes au rez-de-chaussée, là même où l'incendie s'est déclaré. Mais jusqu'à présent aucun des propriétaires responsables de catastrophes similaires n'a été jugé.

Quant aux donneurs d'ordres, les grandes sociétés capitalistes occidentales telles que les géants de la distribution américains Wallmart et Sears, Disney, ceux de l'habillement européen H&M, C&A et même Carrefour pour la France, ils se sont empressés de décliner toute responsabilité dans cette tragédie. Wallmart, Sears, Disney et autres grands distributeurs ont déclaré que leurs sous-traitants avaient fait appel sans leur autorisation à l'entreprise qui a brûlé -- chose difficilement crédible ! Le groupe Carrefour, lui, a tenu à informer les lecteurs du Monde qu'il n'était pas « un client de l'usine Tazreen Fashion » et qu'il se fournissait « dans une autre usine de Tuba Group, qui est régulièrement auditée ». Mais, comme le dénonce l'organisation Peuples solidaires, ces audits menés par les grandes marques ne sont « ni transparents, ni contraignants, ni (surtout) indépendants », et ne contribuent pas à l'amélioration de la sécurité dans les usines textiles du Bangladesh.

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