Dans le monde

Grèce : La population étranglée

Mercredi 7 novembre, le Parlement grec a voté les mesures d'austérité imposées par la Troïka (l'Union européenne, la Banque centrale européenne et le FMI). Dimanche 11 novembre, il a voté le budget 2013 entérinant pour l'année à venir plus de 9 milliards d'économies : c'étaient les deux conditions mises par la Troïka au versement de la tranche « d'aide » de 31 milliards prévue depuis presque six mois.

Pour emporter l'adhésion des députés de la droite et de la gauche, dont les représentants composent le gouvernement, le ministre des Finances a exercé une pression maximum. « Nous avons besoin de la tranche, car la situation des réserves de l'État est limite. Le 16 novembre il faut rembourser des bons du Trésor de cinq milliards d'euros », a-t-il rappelé.

Mais, lundi 12 novembre, les bailleurs de fonds européens et le FMI ont décidé qu'il était urgent d'attendre pour verser leur aide, l'évolution de la dette leur semblant très préoccupante. Elle a atteint en effet 190 % du produit intérieur brut (PIB), au lieu de 170 % en mars dernier. La réduire à 120 % en 2020 est totalement irréaliste, comme c'est évident depuis longtemps.

L'économie grecque s'écroule : la production a reculé de 6,5 % cette année et on s'attend à une chute de 4,5 % pour 2013, chiffre encore hypothétique. Les commerces, les petites entreprises, qui constituent une grande partie du tissu économique, ferment les uns après les autres. Les dernières statistiques officielles donnent un chômage à 25,4 %, deux fois plus qu'en 2010. 58 % des jeunes de 15 à 24 ans et 33 % de la tranche 25-34 ans sont chômeurs. Le bâtiment a supprimé 117 000 emplois en deux ans. Le secteur public, comme le secteur privé, supprime des postes et sabre dans les salaires. La population, asphyxiée par les mesures d'austérité, ne peut pas dépenser ce qu'elle n'a pas. Quant aux Grecs qui ont de l'argent à l'étranger, « ils n'ont pas la confiance nécessaire pour le rapatrier », comme le dit un économiste grec qui qualifie la dette d'insoutenable.

Elle l'est en effet. Et plus le temps passe, plus elle s'accroît et plus il est évident qu'elle est sans fin. Le FMI et les gouvernements européens le savent. Mais les banques centrales de ces États, comme la BCE, ont depuis longtemps racheté des obligations grecques, des créances pourries, aux différentes banques privées. Autrement dit, les gouvernements ont transformé des dettes privées en dette publique et ils se voient mal annoncer ouvertement qu'ils renoncent au remboursement, même partiel, de leurs créances et présenter la note à leur population. D'où la réaction tonitruante du président de la banque centrale allemande, Jens Weidmann, opposé à une nouvelle restructuration, c'est-à-dire un effacement au moins partiel de la dette grecque.

Les choses vont donc continuer à traîner en longueur, dans un système absurde où la dette renforce la dette, où l'argent prêté par la BCE ne transite même plus par l'État grec mais retourne à la BCE pour payer les intérêts. Un système que payent chèrement la population et les travailleurs grecs, qui les 6 et 7 novembre derniers ont été encore 100 000 dans les rues à protester contre ces attaques.

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