Editorial

Le changement indispensable, ce sont les travailleurs qui l'imposeront

Le nombre de chômeurs officiellement recensés vient de dépasser les trois millions. Cela veut dire en réalité près de quatre millions et demi de personnes sans emploi et sans salaire stables. Pas un travailleur qui n'ait, dans sa famille ou parmi ses proches, quelqu'un qui se retrouve dans cette situation ! Pas un seul travailleur qui puisse être sûr d'être à l'abri !

Quoi d'étonnant ? Aucune région, aucun département, aucune ville n'échappe à l'hémorragie qui se traduit par des licenciements et des fermetures d'entreprises. Les suppressions d'emplois sont programmées chez Air France, à Sanofi, chez Carrefour, à Peugeot, chez Doux, à Technicolor. Et combien d'autres qui se préparent ?

Et tout cela pourquoi ? Les ténors du gouvernement socialiste répètent les mêmes arguments usés que leurs prédécesseurs de droite. La crise est d'une gravité sans précédent, vient d'affirmer Hollande. Oui, c'est incontestable ! L'économie capitaliste révèle par cette crise toute sa folie. Mais là où les dirigeants politiques mentent, au moins par omission, c'est en dissimulant que le seul objectif du patronat face à la crise est de préserver les profits des entreprises et les revenus des capitalistes, quitte à démolir la seule source de revenu pour les travailleurs : leur emploi et leur salaire.

À quoi bon pourtant ces profits qui continuent à s'accumuler ? Faute d'investissements productifs et de créations d'emplois, ils ne font qu'alimenter les seuls circuits financiers, la spéculation. On jette des travailleurs à la rue, on ruine leur famille, en fin de compte dans l'unique but d'enrichir les financiers et d'amplifier la spéculation qui détruit l'économie.

Face à cela, que fait le gouvernement ? Rien. Sa seule proposition est de créer 150 000 contrats d'avenir pour les jeunes d'ici à 2014. Mais les emplois créés sont précaires et le chômage augmente à un rythme bien supérieur. Et on ose parler de lutte contre le chômage !

Il ne reste plus rien du cinéma fait par Montebourg début juillet lorsque la direction de Peugeot-Citroën a annoncé la fermeture de l'usine d'Aulnay-sous-Bois et la suppression de 8 000 emplois. Face à la colère des travailleurs du groupe, Montebourg -- qui venait tout juste d'endosser les habits de ministre du Redressement productif -- avait fait mine d'être choqué, reprochant à la direction de PSA la distribution de dividendes juteux en 2011, des rachats d'actions par millions, et disant qu'il « ne laisserait pas faire ». En cette rentrée, son ton a changé. Ses reproches sont maintenant adressés aux travailleurs qui veulent se battre. Il appelle les syndicats de PSA à la « responsabilité économique » pour ne pas « affaiblir » PSA. Autrement dit, les travailleurs de PSA doivent se laisser licencier sans réagir !

Ayrault, le chef du gouvernement, a inauguré l'université d'été du Medef, suivi de pas moins de dix ministres -- grande première pour un Premier ministre. Le gratin du patronat français peut être satisfait, le gouvernement s'est dit conscient des difficultés des entreprises et l'a assuré de son soutien. Les travailleurs sont prévenus : pour leurs difficultés à eux, ils ne doivent pas compter sur le gouvernement socialiste. Alors pourtant que, même pour ceux qui gardent leur emploi, les prix grimpent, les salaires sont bloqués et les loyers deviennent inabordables. C'est toujours en prétextant des « difficultés » que les entreprises se débarrassent des travailleurs. Depuis les débuts de la crise en 2008, les capitalistes se sont servis des travailleurs, de leur salaire et de leur emploi, pour amortir leurs pertes et pour préserver leurs profits.

Sachons-le : les fabricants de chômeurs n'ont rien à craindre du gouvernement PS. Mais nous, nous ne pouvons pas les laisser faire. Nous ne pouvons pas laisser le patronat priver d'emploi de plus en plus de travailleurs et accroître la misère dans la classe ouvrière.

Nous avons collectivement la force de nous défendre. Nous en avons le droit moral. C'est notre travail qui fait marcher leur économie. Et c'est uniquement grâce à notre travail que patrons, actionnaires et banquiers continuent à s'enrichir. Il nous faudra les forcer à puiser dans les profits accumulés et, au besoin, dans les fortunes privées amassées au fil des ans par les actionnaires sur notre dos pour financer le maintien de nos emplois, de nos salaires, de nos conditions de vie. Il ne faut pas les laisser nous étrangler, de plans de licenciements en fermetures d'usines, entreprise après entreprise. Interdiction des licenciements et répartition du travail entre tous sans diminution de salaire, voilà la seule réponse réaliste du point de vue des travailleurs et de leur survie.

Éditorial des bulletins d'entreprise du 3 septembre

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