Dans le monde

Grande-Bretagne : L'austérité pour engraisser les possédants

Northern Rock, la première banque nationalisée de la crise, vient d'être privatisée par le gouvernement Cameron dans une opération qui fait scandale en Grande-Bretagne.

En septembre 2007, cette banque britannique de second plan avait été la première à être menacée de faillite par le volume colossal de ses dettes, entraînant un début de panique bancaire. Elle avait d'abord bénéficié des largesses de la Banque d'Angleterre, avant d'être finalement nationalisée à contrecoeur par les travaillistes, en février 2008. Il en avait coûté à l'État la bagatelle de 1,6 milliard d'euros.

À l'époque, le premier ministre travailliste Gordon Brown avait juré ses grands dieux que le Trésor Public recouvrerait chacune des livres dépensées aux frais du contribuable pour couvrir les dettes de la banque et rembourser les actionnaires. Promesse qui avait été reprise avec la même emphase par le gouvernement actuel lors de son élection en 2010.

Depuis, les deux-tiers du personnel de la banque ont été licenciés. Puis elle a été coupée en deux : une partie, « pourrie », a conservé 57 milliards d'euros de prêts probablement irrécupérables ; une autre partie, « saine », a conservé le label de la banque et les 18 milliards d'euros de ses déposants.

C'est cette dernière partie qui vient d'être privatisée et rachetée par le groupe Virgin du milliardaire Richard Branson.

Déjà, la somme de 860 millions d'euros encaissée par l'État pour cette vente en fait un bradage sans précédent. Mais il y a plus. En réalité, le consortium de Branson ne paiera même pas cette somme, mais à peine la moitié. Le reste viendra de « synergies » que Branson compte réaliser en fusionnant Northern Rock avec sa propre banque, Virgin Money. En d'autres termes, ce sont les salariés qui paieront de leurs emplois les emplettes de Branson !

En tout cas, le bilan pour les caisses publiques n'en reste pas moins une perte sèche supplémentaire de plus de 700 millions d'euros, sans parler de celles à venir, liées à la partie « pourrie » de Northern Rock qu'il n'est pas question de privatiser, bien sûr.

Sans doute ne s'agit-il là que d'un exemple parmi bien d'autres de ce qu'a réellement été le sauvetage du système bancaire, la nationalisation de ses dettes tandis que ses profits restaient aux mains des mêmes actionnaires. Sauf qu'à la différence de ce qui s'était passé pour les autres banques, pour lesquelles tout s'était déroulé derrière l'écran opaque des opérations de la Banque d'Angleterre, la privatisation de Northern Rock a fait apparaître au grand jour à quel point la bourgeoisie peut tirer les marrons du feu de la crise, avec l'aide des politiciens.

Et peut-être, après tout, Cameron se mordra-t-il les doigts d'avoir aidé son ami Branson à faire une aussi bonne affaire. Car le 30 novembre, jour où doit avoir lieu une grève nationale du secteur public prévue de longue date à l'appel de la plupart des syndicats, bien des travailleurs risquent d'avoir envie de dire leur colère d'apprendre que les « économies », prétendument destinées à combler le déficit public et faites aux dépens de leurs retraites, de leurs emplois et de leurs salaires, ne servent en fait qu'à remplir les poches d'un Branson !

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