Mediator : Quarante ans de mensonges de Servier07/09/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/09/une2249.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Mediator : Quarante ans de mensonges de Servier

C'est sous ce titre accusateur que le journal Libération du 6 septembre fait état des dernières révélations dans le scandale du Mediator, ce médicament des laboratoires Servier qui a fait entre 500 et 2 000 victimes avant d'être retiré du marché en 2009. Les témoignages recueillis cet été par les juges chargés des plaintes pour « tromperie », « homicide involontaire » et « escroquerie » contre Servier sont édifiants.

Ainsi, le professeur Charpentier, un des médecins qui ont supervisé les études destinées à obtenir l'autorisation de mise sur le marché (AMM) du Mediator en 1973, dit aujourd'hui -- après avoir fait toute sa carrière chez Servier -- que son travail a été falsifié pour pouvoir présenter la molécule comme un médicament antidiabétique en supprimant toute référence à ses propriétés coupe-faim (anorexigènes). Le dossier présenté en 1973 pour obtenir l'AMM ne parlait donc que des propriétés -- qui sont minimes -- du Mediator sur le métabolisme des glucides et des lipides pour en faire un médicament utile au diabétique obèse, ce qu'il n'était pas. Et le professeur Charpentier d'ajouter : « Le choix du diabète s'explique car c'est un domaine infiniment plus rentable pour les laboratoires »... Et en effet près de cinq millions de malades ont pris du Mediator, qui fut de ce fait un médicament très rentable. Les déclarations du professeur Charpentier ont été confirmées par un autre témoin, le pharmacologue Duhault, présenté comme un des « découvreurs » du Mediator en 1966, qui lui aussi a déclaré aux juges que le produit était d'abord et avant tout un coupe-faim.

Le Fonds public d'indemnisation des victimes du Mediator ouvert le 1er septembre a reçu plus de 500 appels et 130 dossiers ont été déposés. Ce fonds sera géré par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, l'Oniam. À partir de l'avis d'experts, les laboratoires Servier devront faire une proposition d'indemnisation. S'ils refusent, les malades seront indemnisés par l'Oniam qui se retournera ensuite vers la justice pour essayer d'obtenir que Servier rembourse les sommes versées. On sait que l'attitude du laboratoire est d'essayer de faire porter la responsabilité sur les médecins qui ont prescrit le médicament à des malades non diabétiques -- ce qui serait le cas dans 77 % des prescriptions d'après une étude de l'Agence française du médicament. Servier aidé de son armée d'avocats se lancera dans des procès longs et coûteux pour nier ses responsabilités, laissant aux contribuables le soin de payer la note.

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