Brésil : La présidente renvoie son premier ministre29/06/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/07/une-2239.gif.445x577_q85_box-0%2C18%2C234%2C321_crop_detail.png

Dans le monde

Brésil : La présidente renvoie son premier ministre

Cinq mois après son entrée en fonctions, la présidente brésilienne Dilma Roussef a dû se séparer d'Antonio Palocci, le ministre de la Maison civile qui, dans le régime présidentiel brésilien, joue le rôle de Premier ministre. Palocci était depuis trois semaines au centre d'un scandale, mais il semble bien qu'à travers lui c'était la présidente et sa manière de gouverner qui étaient visées.

Palocci est un des principaux dirigeants du Parti des travailleurs (PT), le parti de Lula, et a été un des artisans de la campagne présidentielle de Dilma Roussef. Sous la présidence de Lula (2003-2010) il a été ministre des Finances. Mais il a dû démissionner en 2005, comme la plupart des dirigeants du PT, à la suite du scandale dit du Mensalao : le parti au pouvoir achetait les votes de plus de cent députés en leur versant en liquide une allocation mensuelle de l'ordre de 10 000 dollars, alimentée par un système de pots-de-vin fonctionnant à l'échelle du pays. C'est l'implication de tous les chefs du PT dans ce scandale qui a entraîné l'ascension de Dilma Roussef.

Cette fois-ci, c'est son enrichissement personnel qui était reproché à Palocci. Le 15 mai, le journal Folha de Sao Paulo révélait que, pendant les quatre ans (2006-2010) où il avait été député, il avait multiplié son patrimoine par vingt, en particulier grâce à un cabinet de consultants ressemblant fort à une officine de trafic d'influence. Rien qu'en 2010, cela lui a rapporté l'équivalent de dix millions d'euros, dont la moitié encaissés après l'élection de Dilma Roussef, à un moment où il était clair qu'il serait une des têtes du gouvernement.

Mais si c'est bien cet enrichissement scandaleux qui a provoqué la démission de Palocci, il semble que derrière lui la manoeuvre visait la présidente. Les partis, et spécialement les nombreux partis du centre et de la droite qui l'appuient au Parlement, lui reprochent de ne pas leur avoir accordé assez de postes dans les organes du pouvoir, ou pas ceux qu'ils auraient voulus. Or ces postes, lucratifs autant qu'honorifiques, sont leur pain quotidien.

Cette fronde des partis s'est exprimée dans la campagne contre Palocci, dont l'enrichissement n'était ni plus ni moins scandaleux que celui de nombre de ses amis ou adversaires. les attaques contre le ministre ont servi à donner un avertissement à la présidente : il faut tout négocier avec les partis qui la soutiennent, sinon les ennuis commencent. Autre manifestation de cette fronde parlementaire : l'adoption, dans le nouveau Code forestier, d'une clause d'amnistie pour les déboiseurs illégaux. Certes, par ce nouveau code, le gouvernement voulait complaire au lobby des grands éleveurs de bovins et planteurs de soja ou de canne à sucre, gros exportateurs qui sont les premiers bénéficiaires de la déforestation en Amazonie. Mais, politesse à l'égard des défenseurs de l'environnement, la présidente ne voulait pas d'amnistie pour les déboiseurs déjà condamnés. C'est pourtant cela que le Parlement a voté, et en particulier le PMDB, grand parti du centre droit auquel appartient le vice-président Michel Temer.

Jusqu'à présent, ce sont donc les députés et l'agro-business qui causent des soucis à la présidente. Il y a bien eu des grèves pour les salaires : celle des pompiers de Rio, que la police a durement réprimés, ou celle des ouvriers de l'usine Volkswagen de Curitiba, qui ont obtenu une augmentation de 10,3 % ainsi que des primes. Mais globalement les travailleurs ne se sont guère manifestés, et encore moins les syndicats, qui sont complices du gouvernement. Pourtant l'inflation grignote le pouvoir d'achat, qui n'est déjà pas bien élevé, et tous les services publics subissent des réductions budgétaires, en particulier la santé et l'éducation. L'exemple de Palocci, qui l'an passé a empoché autant que 3 000 salariés payés au salaire minimum, pourrait inciter les travailleurs à poser le problème de leurs propres revenus.

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