Leur société

Défendre les retraites !

Une semaine avant le « sommet social » de l'Élysée, au cours duquel Sarkozy réunira ses ministres et les représentants du Medef et des confédérations syndicales pour fixer l'art et la manière de s'attaquer aux retraites, des membres des directions de la CGT, de la CFDT, de la CFE-CGC, de la FSU, de l'UNSA et de Solidaires se sont rencontrés le 8 février. L'organisation d'une journée d'action aurait été évoquée, mais pour l'instant sans plus de précision.

Les intentions de Sarkozy et de Fillon, même confusément exprimées, sont claires sur le fond : s'en prendre au système de retraite, des salariés du privé comme du secteur public, et mener cela rondement, dans l'intervalle entre les élections régionales et la fin de l'été 2010. Rien n'est à écarter : ni un recul de l'âge légal de départ, ni un nouvel allongement de la période de cotisation, ni un rapprochement à la baisse des conditions du public et du privé, ni une augmentation du montant des cotisations des salariés.

Escomptant une résignation de ceux-ci, malgré la publication d'un sondage où les sondés, du privé comme du public, se sont déclarés à 63 % favorables au maintien de l'âge légal de départ à 60 ans, Sarkozy croit pouvoir faire passer facilement l'amère pilule du recul à 61 ans ou plus. L'âge moyen de départ en retraite, en 2009, s'est en effet établi à 61,5 ans pour les salariés du privé. Mais les travailleurs qui ont ainsi dû prolonger leur activité ne l'ont pas fait par goût de l'exploitation : les réformes de Balladur en 1993, qui ont augmenté de 37,5 à 40 les annuités nécessaires à l'obtention d'une retraite à taux plein, mais aussi les années de chômage, d'invalidité, de RMI ou de travail à temps partiel les contraignent à cotiser plus longtemps.

L'allongement de l'espérance de vie et l'augmentation du nombre de retraités sont invoquées. Mais ces données démographiques sont à mettre en parallèle avec l'augmentation formidable de la productivité en quelques décennies. Cette dernière rend possible la prise en charge par la société des retraités, qui ont non seulement créé des richesses toute leur vie durant, mais aussi versé une part non négligeable de leur salaire pour faire vivre les plus anciens. Elle pourrait même, sans problème, déboucher sur une réduction générale du temps de travail ! Mais l'accaparement des produits du travail par les capitalistes de l'industrie et de la finance, qui s'auto-distribuent dividendes, bonus et autres profits spéculatifs, prive des centaines de millions de travailleurs de ce progrès possible.

En pariant sur la passivité des directions syndicales, et aussi sur leurs prises de position différentes, notamment celle de la CFDT dont le leader s'est déjà déclaré favorable à un « rapprochement » public-privé, ou de FO qui a refusé de participer à la rencontre du 8 février et de la CFTC qui s'est placée en « observateur », Sarkozy espère pouvoir réaliser ses mauvais coups sans susciter de vagues.

Les déclarations des différents leaders syndicaux restent sur le terrain choisi par Sarkozy : ils « n'accepteront pas une mascarade de concertation », « ne se laisseront pas enfermer dans un calendrier », « refusent le passage en force »... Mais ils ne se déclarent pas radicalement opposés à toute nouvelle atteinte aux retraites. Cependant, tout peut dépendre de la détermination dont le monde du travail fera preuve pour affirmer qu'il n'y a rien à négocier et que la retraite, c'est à 60 ans, à taux plein, avec un retour aux 37,5 annuités. Quant au financement des pensions, le patronat a tous les moyens de l'assumer en prenant sur les profits accumulés grâce au travail des salariés.

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