Leur société

Quand Estrosi reprend le «produire français» : Pour quelques voix de plus...

Le groupe Renault ayant annoncé qu'il comptait faire fabriquer, à partir de 2012, une partie des Clio IV en Turquie, Sarkozy et son ministre de l'Industrie, Estrosi, ont embouché une nouvelle fois les trompettes de leur « politique industrielle volontariste » et parlé de défense de l'emploi.

Les discours sur ce thème n'ont pas manqué depuis le début de la présidence de Sarkozy, et ils ont redoublé depuis le début de la crise économique. Cela n'a évidemment pas empêché des centaines de milliers de travailleurs d'être licenciés et un nombre équivalent d'intérimaires de se trouver sans contrat depuis des mois.

La « volonté » du gouvernement ne va en effet pas bien loin et ne diffère guère de celle des gouvernements précédents. Il fait aux patrons, et particulièrement aux grands groupes, les cadeaux qu'ils exigent et surtout ne demande rien en échange. Peugeot et Renault ont ainsi reçu, il y a juste un an, trois milliards chacun directement et quelques autres crédits indirectement, en donnant simplement « l'assurance » qu'ils ne fermeraient aucun site en France et qu'ils allaient « tout faire pour éviter les licenciements », selon les mots de Sarkozy lui-même. Quelques jours après, Peugeot annonçait un plan de suppressions d'emplois sans soulever le moindre commentaire de la part du gouvernement. Depuis, les deux constructeurs ont continué leur politique de réduction d'effectifs.

Les autres interventions du gouvernement pour « défendre l'emploi » ont été du même acabit. Le ministre Estrosi s'était par exemple vanté l'an dernier d'avoir sauvé les emplois de l'usine Molex de Villemur-sur-Tarn. Elle compte aujourd'hui moins d'une vingtaine d'ouvriers, sur les 280 qui y étaient employés. En revanche le groupe financier qui possédait l'usine a pu s'en retirer sans dommage (pour lui). Ainsi, de discours présidentiel en esbroufe ministérielle, le taux de chômage, officiel et très sous-estimé, va atteindre 10 % de la population active.

En fait la seule « politique industrielle » du gouvernement est de laisser le grand patronat gérer ses affaires comme il l'entend, comme vient encore de le montrer la convocation pour la galerie et sans aucun résultat du PDG de Renault à l'Élysée. Tout juste l'État a-t-il le devoir de renflouer les caisses des grands groupes ou de leur assurer des débouchés lorsque leurs bénéfices menacent de baisser.

Mais, à l'approche des élections régionales, le gouvernement ne peut pas avoir l'air de rester les bras ballants devant la hausse du chômage. C'est ce qui explique le « Nous ne mettons pas tant d'argent pour soutenir nos constructeurs pour que la totalité des usines s'en aillent » de Sarkozy et le « Les voitures françaises vendues en France doivent être produites en France » de son ministre de l'Industrie, ainsi que quelques autres déclarations d'étoiles de moindre grandeur allant dans le même sens.

Ce genre de déclaration, faite pour tenter d'attirer l'électeur et qui se résume à « produisons français », ne risque pas d'avoir le moindre commencement d'application dans la période actuelle. Les grands groupes capitalistes n'en veulent pas. Renault, Peugeot et leurs semblables, dans l'industrie comme dans la finance, sont des groupes de taille mondiale qui font leurs choix de production à cette échelle, de façon à optimiser leurs profits. Il ne s'agit pas pour les travailleurs de déclarer qu'ils doivent produire ici plutôt que là, ce qui reviendrait à mettre en concurrence les ouvriers de France, de Turquie ou d'ailleurs. Il s'agit en revanche d'imposer la garantie de l'emploi et des salaires, par l'interdiction des licenciements et la répartition du travail entre tous. Il n'y a pas de raison que les grands groupes puissent faire leurs choix au détriment des travailleurs et de leurs emplois, comme si c'était la seule variable d'ajustement possible.

Si variable d'ajustement il doit y avoir, que ce soit celle des profits. Il est vrai qu'il ne faut pas compter sur Sarkozy pour imposer une telle mesure.

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