Dans les entreprises

Continental et l'État en accusation

Le procès en appel des salariés de Continental a mis en lumière les vrais enjeux et les vraies responsabilités de cette entreprise et de l'État.

Ces six salariés ont été poursuivis et condamnés en première instance sous l'accusation de destruction et dégradation de biens, aggravée par le fait qu'ils étaient plusieurs, et donc accusés d'avoir commis « un délit en réunion », à la sous-préfecture de Compiègne, c'est-à-dire qu'ils auraient prémédité ce dont on les accusait ! En réalité, pas plus devant la cour d'appel qu'à Compiègne, il n'a pu être reproché un acte précis de destruction à aucun des salariés poursuivis. Le seul reproche était d'avoir été là avec quelques centaines d'autres, coupables d'une responsabilité collective : « Si ce n'est toi, c'est donc ton frère ». Exactement ce que permettait la loi anticasseurs abrogée en 1981, et qualifiée alors, à raison, de liberticide.

C'est ce qu'a pu montrer tout au long du procès l'avocate des salariés, Marie-Laure Dufresne-Castets. C'est ce qu'ont démontré aussi les témoins de l'intersyndicale et du comité de lutte : aucune préméditation, des salariés à bout à cause de la violation des engagements du gouvernement et de la proximité de la fin de la procédure autorisant l'envoi des lettres de licenciement ; et du coup l'explosion de colère à l'annonce du jugement de Sarreguemines qui déboutait les salariés de toutes leurs demandes.

Finalement, contrairement aux engagements pris par le gouvernement, les seuls qui ont bénéficié de l'amnistie de tous leurs délits ont été les « patrons voyous », appelés comme tels par le pouvoir, de Continental.

Les dix témoins de moralité, syndicats et dirigeants de partis, se sont succédé pour demander la relaxe en montrant le caractère discriminatoire et d'atteinte au droit de tous les salariés qu'aurait une condamnation dans ces conditions.

Il est certain que ces témoignages conjoints ont pesé sur les réquisitions du procureur, qui, s'il n'a pas demandé la relaxe, a dû reconnaître la sympathie que la lutte des travailleurs de Continental avait soulevée en Picardie et dans tout le pays. S'il a requis des peines allégées de prison avec sursis, il a demandé qu'elles puissent être transformées en travaux d'intérêt général, répétant à trois reprises en direction des juges : « Je ne vous demande pas un jugement de clémence, mais un jugement modéré. » Quant au représentant de l'État, il s'est dit encore incapable aujourd'hui de donner la liste de ce qui a été détruit et d'en chiffrer le montant !

Le jugement sera rendu le 5 février.

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