Air France : Pour dédouaner le patron, des bobards sur le « trou » du Comité central d'entreprise21/01/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/01/une2164.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Air France : Pour dédouaner le patron, des bobards sur le « trou » du Comité central d'entreprise

Quand Air France annonce 400 millions de déficit, Le Figaro mentionne à peine l'information. Et, bien sûr, il se garde de mettre en cause la gestion et surtout l'honnêteté des dirigeants d'Air France-KLM à cette occasion.

Mais quand le Comité central d'entreprise (CCE) d'Air France commandite un audit de ses propres comptes, le même journal titre sur « un trou de plus de 20 millions dans les comptes » qui serait dû aux « troublantes pratiques du CCE d'Air France ».

En fait, l'audit n'a trouvé « aucune preuve d'enrichissement personnel des élus » ni ce « trou inexpliqué de 21 à 24 millions d'euros » annoncé par Le Figaro. Mais c'était sans doute là des détails pour qui, le même jour, proposait à ses lecteurs un sondage : « Les Comités d'entreprise touchent-ils trop d'argent ? »

Ces bobards, on le constate, ont pour but d'alimenter la campagne de la droite contre les salariés de certaines grandes entreprises, présentés comme des privilégiés, et contre tout ce qui peut amputer les dividendes versés aux actionnaires. Et puis, cela permet aussi de masquer les véritables raisons des problèmes financiers du CCE d'Air France.

Car, même si elles sont à la tête d'un des CCE les mieux dotés du pays, les organisations syndicales de la compagnie ont de plus en plus de mal à équilibrer ses comptes, pour des raisons évidentes. Ce CCE reçoit 3,1 % de la masse salariale d'Air France, une dotation qui baisse d'année en année du fait de la stagnation des salaires et de la réduction des effectifs. Ensuite, alors qu'auparavant la direction faisait des avances de trésorerie au CCE pour certaines dépenses, comme des séjours de vacances, elle a cessé de le faire.

Et puis, après des années de procédure juridique, le syndicat des pilotes, SNPL, qui gère l'un des huit Comités d'établissement du CCE, celui des personnels navigants, a obtenu de ne plus devoir verser toute sa quote-part au pot commun. Ce CE, qui représente 33 % des effectifs de la compagnie et près de la moitié de sa masse salariale, ne participe donc plus guère au financement d'activités centralisées du CCE tels les séjours de vacances familiales, les colonies de vacances. Un autre CE, celui du Commercial international, veut faire de même.

Voilà comment le CCE d'Air France se retrouve avec 15 millions de déficit, un déficit provoqué par la direction et aggravé par l'égoïsme corporatiste de certains syndicats.

Bien sûr, cela n'excuse en rien la façon dont les directions syndicales acceptent de gérer les oeuvres sociales (organisation de vacances, de cantines...) que leur concède le patron, ni le fait que, dans ce cadre, on les a souvent vues se comporter plus en patrons qu'en syndicalistes.

À preuve, plusieurs condamnations en tribunal prud'homal du secrétaire du CE de Roissy DM (ateliers, pistes et hangars), il y a quelques années, pour non-respect du code du travail et licenciements abusifs. Ou encore récemment à Orly-Nord (ateliers et hangars), les nombreux débrayages d'employés du CE, appuyés par les salariés d'Air France, contre l'aggravation de leurs conditions de travail et les méthodes patronales des responsables du CE.

Les travailleurs d'Air France ne sont pas vraiment surpris par les difficultés du CCE et ils sont nombreux à ne guère faire confiance à ceux qui le dirigent, ou l'ont dirigé, et qui voudraient aujourd'hui se présenter en sauveurs.

Pour autant, l'inquiétude demeure. Pour le millier de salariés qu'emploient le CCE et les CE. Mais aussi pour les activités qu'utilisent souvent pour leurs vacances des travailleurs et leur famille.

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