Haïti

Aide internationale et compétition politico-médiatique

Alors que la population haïtienne essaie de survivre à une catastrophe épouvantable, la compétition politico-médiatique continue entre les grandes et moins grandes puissances.

Les Américains ont dégainé les premiers, le gouvernement Obama mobilisant dès les premières heures, comme le dit le président lui-même, « marins, soldats, aviateurs, marines, gardes-côtes et sauveteurs civils. »

Sarkozy n'a pas voulu être en reste : quarante-huit heures après le séisme, il appelait à une grande conférence internationale « pour la reconstruction et le développement » d'Haïti. Il a pris de vitesse la Commission européenne et la vice-présidente britannique de l'exécutif européen Catherine Ashton. Mais les ministres du Développement, réunis à Bruxelles le lundi 18 janvier, ont décidé de débloquer une aide humanitaire de 130 millions d'euros et de dédier 200 autres millions d'euros à la reconstruction d'Haïti d'ici 2013. Ils ont également adopté le projet de conférence proposé par Sarkozy.

Cela fait dérisoire à côté de l'action du gouvernement américain appuyée, elle, sur des moyens considérables. Obama a également appelé à la rescousse médiatique les anciens présidents, Bush, qui essaie peut-être de faire oublier son inexistence lors du cyclone Katrina en Louisiane, ainsi que Bill Clinton. Une belle unanimité nationale pour démontrer que, selon les propos du président des États-Unis repris par Le Monde du 20 janvier, « le leadership américain est fondé en partie sur le fait que nous ne recourons pas à notre puissance pour soumettre les autres, nous l'utilisons pour les aider à reprendre pied » ; et après un rappel du plan Marshall et de l'aide aux Berlinois, il conclut : « C'est pourquoi les États-Unis d'Amérique prendront la tête de cette entreprise humanitaire mondiale. » Bon prince, en ajoutant le Brésil, le Canada et d'autres pays, Obama s'est rallié à la conférence proposée par le gouvernement français : c'est du moins ainsi que l'Élysée l'a présenté. Quant à Sarkozy, jouant le distributeur de bons points, il n'a pas hésité à saluer « la mobilisation exceptionnelle du président Obama ».

Le secrétaire d'État à la coopération, Joyandet, qui a eu quelques démêlés avec les autorités américaines pour faire atterrir ses avions à Haïti, a reconnu l'efficacité des États-Unis, tout en rappelant, sur Europe 1 le 19 janvier, que « la France était là le premier jour », que les autres États européens lui ont confié le « leadership » - un rôle décidément très convoité - pour organiser le rapatriement de leurs ressortissants encore à Haïti. Enfin il a ajouté qu'il fallait préciser les choses et le rôle de l'ONU, car « il s'agit d'aider Haïti et non pas de l'occuper ». À bon entendeur...

Bref, chaque gouvernement prétend déborder de compassion pour les Haïtiens mais il déborde surtout de zèle pour se mettre en valeur et tenter d'y gagner quelque chose. Un spectacle particulièrement écoeurant dans une situation aussi tragique.

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