Technocentre de Guyancourt (Yvelines) : Après les suicides, Renault a affaire aux tribunaux28/10/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/10/une2152.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Technocentre de Guyancourt (Yvelines) : Après les suicides, Renault a affaire aux tribunaux

Avant France Télécom, Thales, Peugeot, le Technocentre de Renault avait fait la une de l'actualité à cause des suicides. Dans ce site, où 10 500 salariés conçoivent et développent les nouveaux projets de véhicules, sept suicides ont eu lieu depuis 2004.

Mercredi 8 octobre, on apprenait à nouveau qu'un ingénieur avait mis fin à ses jours à son domicile, et une enquête est en cours. C'est dans ce contexte que trois familles sont en train d'intenter des actions en justice contre Renault. Parmi elles, Sylvie T., la veuve d'un ingénieur qui s'était suicidé en octobre 2006, vient d'attaquer Renault pour « faute inexcusable ».

Les interviews que Sylvie T. a accordées à la presse en disent long sur la volonté de Renault de nier toute responsabilité dans le suicide. Dans un premier temps, déclare-t-elle, la direction a voulu faire croire que son mari s'était suicidé à cause de problèmes personnels, en prétendant qu'il était en instance de divorce, ce qui était faux. Renault lui a ensuite affirmé que des scellés avaient été installés sur le poste de travail de son mari, pour les besoins de l'enquête, ce qui était également faux. Lorsqu'elle a enfin pu récupérer l'agenda électronique de son mari, elle a constaté qu'il avait été vidé et réinitialisé. Ne pouvant « accepter qu'après avoir broyé un homme, on écrabouille sa famille pour une question de finances ou d'image », elle a alors décidé d'entamer, par l'intermédiaire de la CNAM (la Caisse d'accidents du travail et de maladie), une longue procédure d'une année pour faire reconnaître le suicide comme accident du travail. « Mon mari, raconte-t-elle, travaillait toutes les nuits, tous les soirs, tous les week-ends, il disait sans cesse qu'il était nul, qu'il n'y arriverait jamais, qu'on ne lui pardonnerait aucune faute. »

Lundi 19 octobre, Sylvie T. a entamé une nouvelle procédure, auprès du tribunal des affaires de Sécurité sociale de Nanterre, afin de faire reconnaître officiellement et publiquement la faute de l'employeur - de manière symbolique, puisqu'elle réclame un euro de dommages et intérêts. Si la démarche aboutit, c'est Renault et non plus la CNAM qui versera la rente à laquelle elle a droit. Le tribunal a mis son jugement en délibéré au 14 décembre. Sylvie T. veut, comme elle l'a dit, « condamner le mode d'organisation du travail qui fait passer les résultats financiers, les compressions de coûts et l'image de l'entreprise avant la santé des salariés ». En 1991, un directeur de projet de Renault avait osé dire que le stress était une condition importante pour « réussir un projet impossible », en faisant des économies avec des délais raccourcis. Aujour¬d'hui, on voit où cela conduit.

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