Dans le monde

L'Artic Sea, « perdu » puis retrouvé : Transport maritime et écrans de brouillard

Disparu le 24 juillet en mer Baltique, l'une des plus fréquentées du monde, après une prétendue attaque de pirates (ce que l'on n'avait pas vu depuis longtemps en Europe), l'Artic Sea, un cargo russe de 4 000 tonnes (ce qui n'est pas rien) a réapparu au large des côtes africaines, le 17 août.

Entre-temps, on a appris que la valeur de son chargement déclaré (du bois pour 1,6 million d'euros) était trop modeste pour tenter des pirates, que la rançon réclamée était ridicule. En outre, chose inhabituelle, les marines de guerre de Russie et de l'OTAN ont coopéré pour traquer ce qui était présenté comme un bateau-fantôme.

On a aussi évoqué l'hypothèse que ce navire transportait en fait de la drogue et aurait été la cible d'un règlement de comptes entre bandes mafieuses, comme il y en a tant en ex-URSS, ce que semble confirmer le ministère de la Défense russe quand il déclare avoir arrêté à son bord huit « pirates » russes, lettons et estoniens.

Mais au-delà de ces aspects finalement banals, du moins pour l'ex-Union soviétique, ce qui pourrait passer pour le « polar de l'été » a aussi rappelé comment opère une grande partie du transport maritime mondial, et l'épais brouillard dont il s'entoure.

Ainsi, avec son équipage russe, l'Artic Sea est immatriculé à Malte. Il navigue donc comme tant d'autres sous un pavillon de complaisance bien connu, et européen, malgré ce que prétendent les États de l'Union européenne et les autorités de Bruxelles quand ils disent lutter contre de telles pratiques. De plus, ce navire appartient à Solchart Management Ltd qui, comme son nom ne l'indique pas, est une société sise à Helsinki, une société-écran dont le capital social (15 000 euros !) est si faible qu'il est même inférieur à la valeur déclarée du bois chargé par l'Artic Sea ! Mieux, cette société, à laquelle les autorités finlandaises ne trouvaient apparemment rien à redire, est la filiale d'un groupe basé en Russie, mais « certifié, disent ses documents officiels, par les gouvernements de la République de Malte et de la République du Liberia ».

Un joli petit tour du monde que peut faire un bateau sans quitter le port : celui des pavillons de complaisance, des États abritant les filiales de sociétés-mères situées dans d'autres pays. Un système destiné à les mettre à l'abri de poursuites en cas de problème, et tout particulièrement de catastrophe maritime.

Car l'Artic Sea a peut-être des actionnaires russes mafieux, en tout cas les uns et les autres usent des mêmes méthodes que les Amoco Cadiz, Erika et autres affrétés par Total, Exxon et compagnie, dont on sait comment, régulièrement, ils ont pu polluer quasiment impunément toutes les mers du globe et leurs rivages.

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