Voile, niqab et burqa : symboles d'oppression des femmes

27 Juin 2009
Mardi 23 juin, l'Assemblée nationale a décidé de créer une mission parlementaire, qui devra travailler pendant six mois sur la question du port du voile intégral en France. Cette décision fait suite à la proposition du député-maire communiste de Vénissieux, André Gérin, rejoint depuis par plusieurs dizaines de députés de droite et de gauche.

Le sujet divise manifestement le gouvernement. Sarkozy, quant à lui, après avoir publiquement acquiescé aux reproches d'Obama qui fustigeait les pays qui n'acceptaient pas le port du voile, a finalement déclaré que la burqa, « c'est un signe d'abaissement, c'est un signe d'avilissement », avant de renvoyer au Parlement le soin d'étudier la question.

La pratique qui consiste à voiler intégralement le corps de la femme la réduit à un fantôme ambulant, invisible et donc inaccessible au regard d'autrui. La burqa ou le niqab ne sont plus des symboles d'enfermement mais constituent l'enfermement lui-même, une véritable prison ambulante. La femme n'a alors plus le droit d'exister dans l'espace public. Mais, pour violents qu'apparaissent la burqa et le niqab, le voile lui-même revient à considérer la femme comme un objet appartenant aux hommes. C'est une marque d'infériorité imposée qui consacre la soumission de la femme en tant qu'objet sexuel, sommé de se protéger sous peine de mériter l'agression. Sa seule vocation serait celle d'une reproductrice devant se consacrer à son mari, à ses enfants et aux tâches domestiques.

La burqa ou le niqab tendent à se multiplier depuis quelques années dans certains quartiers populaires. Ils sont de véritables uniformes politiques revendiqués par les intégristes musulmans du courant salafiste. Certaines femmes recouvertes d'un voile intégral sans aucune ouverture pour les yeux ne peuvent même plus marcher toutes seules dans la rue. Elles ont besoin d'être guidées. Lors du débat sur l'interdiction du voile à l'école, l'auteure iranienne Chahdortt Djavann écrivait déjà fort justement que le voile, c'est l'étoile jaune de la condition féminine. Que dire du voile intégral !

Dans cette affaire, on ne peut qu'être choqué par la complaisance des médias vis-à-vis de certaines porteuses de burqa, qui se déclarent « libres » et « épanouies ». Mais le fait que certaines la revêtent fièrement n'enlève rien à son caractère réactionnaire, arriéré, moyenâgeux et à l'oppression, même librement consentie, qu'elle représente. Que des jeunes femmes revendiquent les chaînes qui les asservissent, tant pis pour elles, serait-on tenté de dire. Mais le problème, c'est qu'elles - et surtout leur entourage - en font un combat qui tire toute la société en arrière. Reconnaître la « liberté » de porter la burqa, ce serait aider à nier la liberté des milliers d'autres de refuser les pressions qui les poussent à la porter.

La liberté religieuse, elle aussi invoquée, ne peut être prise pour argument. Elle a une limite : la dignité de l'être humain. Entre les libertés il faut choisir, et l'on doit être au côté des femmes qui veulent vivre au grand jour et ne pas être des emmurées, même « volontaires ».

Derrière une prétendue tolérance qu'il faudrait avoir vis-à-vis des pressions exercées par les religieux, derrière une prétendue liberté individuelle qui devrait faire tout accepter, y compris des idées et des comportements rétrogrades, il y a un profond mépris à l'égard des populations pauvres et démunies qui doivent rester sous la tutelle de forces réactionnaires. Ces idées, ces comportements ont été exprimés sans fard par un archevêque anglais, Rowan Williams, qui affirmait que pour maintenir la cohésion sociale il fallait laisser agir les religieux, quitte, disait-il, à permettre « l'adoption de certaines parties de la charia ». Cette politique visant à renforcer le poids des autorités religieuses fut aussi celle de Sarkozy lorsqu'il fut ministre de l'Intérieur et des Cultes.

S'opposer au voile, à la burqa ou au niqab est un combat social et politique. En ce qui nous concerne, nous choisissons le camp de toutes les femmes qui ne veulent pas être des esclaves, qui se battent pour leur liberté, leur dignité. Des militants communistes ne peuvent qu'être à la pointe de ce combat. Pour le mouvement socialiste et communiste, le combat pour l'émancipation sociale, économique et politique n'a jamais été indépendant du combat contre toutes les oppressions. Au XIXe siècle, un militant socialiste expliquait que le degré de l'émancipation d'une société se mesurait au degré de l'émancipation des femmes. Au XXIe siècle, cette idée garde encore toute son actualité.

Maud NATHAN