Dans le monde

Sarkozy-Merkel : Les deux font la paire

Devant l'indifférence affichée de l'électorat pour l'élection des députés européens, le président français et la chancelière allemande ont décidé de frapper un grand coup en publiant un appel commun au vote. Il s'agirait, en cette période de crise économique catastrophique, de convaincre la population des vertus protectrices de l'Union européenne.

Pourtant, alors que le chômage frappe ou menace des dizaines de millions de travailleurs d'Europe, le mot n'apparaît même pas dans la déclaration, pas plus qu'il n'y est fait mention de licenciements ou de fermetures d'entreprises. Ce qui angoisse les 210 millions de salariés des 27 pays membres de l'Union européenne ne préoccupe guère ses deux principaux dirigeants politiques.

Dans leur appel, Merkel et Sarkozy se déclarent « pour une Europe qui protège ». Mais qui et de quoi ? La réponse se lit entre les lignes : l'Union européenne doit encore mieux protéger les grands groupes industriels et financiers, ce qui signifie surtout les protéger... de toute diminution de leurs profits. Pour ce faire, Sarkozy et Merkel proposent de continuer à laisser la possibilité à chaque État de soutenir ses propres grandes entreprises comme il l'entend, de refuser d'appliquer tout règlement qui entraverait tant soit peu la rentabilité de ces groupes et même de faciliter encore les mouvements de capitaux et les possibilités des financiers.

Les deux dirigeants européens parlent également de prendre des « mesures décisives » pour diminuer la dette publique, en évitant toutefois de rappeler que cette dette a été creusée par les centaines de milliards d'euros de cadeaux faits aux capitalistes. Et les économies se feront, comme elles se font déjà, en supprimant des emplois dans la fonction publique et en diminuant les crédits destinés aux services publics utiles à la population.

Tout le reste n'est que du vent, des phrases convenues que n'importe quel énarque frais émoulu ou son équivalent allemand sont capables d'écrire au kilomètre pour n'importe quel président. Le simple fait que ces gens et leurs patrons osent parler en ce moment « d'une économie qui tend au plein emploi » montre à quel point ils se moquent de ce que vivent et ressentent les travailleurs.

Pour signer un texte commun, chacun des deux a dû mettre un peu de côté son fonds de commerce électoral national. La déclaration ne mentionne donc pas la lutte contre la délinquance ni le refus de l'adhésion de la Turquie à l'Union, thèmes de prédilection de la campagne électorale de Sarkozy. Il reste un bruit de fond sans signification, qui ne se donne même pas la peine de cacher la défense toute nue des intérêts des grands groupes capitalistes européens.

Cela a le mérite de la clarté, au moins sur ce point, car c'est exactement de cela, et uniquement de cela, qu'est faite la construction européenne depuis ses débuts. Quant à savoir si cela intéressera les électeurs ou s'ils se serviront de l'élection pour dire ce qu'ils pensent, c'est une autre histoire.

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