Dans les entreprises

Air France : Et un vol de TGV !

Air France serait sur le point de s'associer au groupe Veolia pour faire circuler ses propres TGV, dans la perspective de l'ouverture à la concurrence, le 1er janvier 2010, du trafic de passagers sur le réseau ferré (pour le fret, c'est déjà fait). Pour ne pas avouer crûment qu'il s'agit d'un nouveau cadeau que l'on s'apprête à faire aux capitaux privés, on nous dit, sans rire, que cette concurrence fera baisser les prix. Mais à qui fera-t-on croire qu'ajouter aux frais d'exploitation d'un TGV la redevance (le " péage ") qu'Air France et Veolia devront verser à RFF (Réseau ferré de France), et plus encore les bénéfices des actionnaires de ces deux groupes privés, réduira l'addition pour les voyageurs ?

Le nombre d'usagers des liaisons ferroviaires à grande vitesse ne cessant de croître, la perspective de s'approprier une part de ce gâteau (estimé à un milliard d'euros de chiffre d'affaires annuel, selon un chiffre paru dans la presse) fait saliver certains groupes privés comme Veolia, Air France ou d'autres.

Veolia est déjà présent dans le secteur des trains de banlieue à Stockholm, à Boston et aura bientôt un train rapide en Allemagne. S'agissant d'Air France, la compagnie aérienne cherche à tirer des profits des déplacements de passagers à l'intérieur de l'Hexagone. En effet, depuis des années, le volume du transport aérien intérieur a considérablement diminué au profit de déplacements en TGV, souvent aussi rapides qu'en avion, mais plus pratiques et moins polluants, sinon moins chers.

De ce fait, Air France a dû fermer nombre de ses dessertes intérieures. Mais cela n'empêche pas la compagnie de chercher à tirer profit de la situation... en prenant pied dans le secteur du rail. D'autant plus que l'État, via la SNCF et RFF, a pris à sa charge, sur des financements publics, de déblayer le terrain aux profits privés. Car c'est bien l'État qui a voulu et mis en oeuvre le développement des liaisons ferrées à grande vitesse.

C'est lui aussi qui a déjà été mis à contribution pour aider Air France à drainer par le rail une masse importante de passagers vers son " hub " (sa plaque tournante) de Roissy, grâce à la gare TGV spécialement construite à l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Cette liaison TGV a rabattu la clientèle des passagers aériens depuis différentes villes de province. Mais aussi depuis l'étranger, notamment avec le Thalys, un TGV qui circule entre la France, la Belgique, l'Allemagne et la Hollande, et qui dessert non seulement le " hub " d'Air France, mais celui de sa compagnie jumelle, KLM, à Schiphol, près d'Amsterdam, aux Pays-Bas !

S'agissant de l'ouverture du réseau ferré français à la concurrence privée, il ne serait pas question, selon RFF, d'autoriser tout de suite toutes les dessertes (le " cabotage ") entre différentes villes. Il s'agirait d'autoriser dans un premier temps les liaisons entre Paris et d'autres capitales européennes. Mais quand une faille est ouverte, elle peut s'élargir très vite. Air France en sait quelque chose : il y a une dizaine d'années, quand le Premier ministre PS d'alors, Jospin, et son ministre des Transports du PCF, Gayssot, décidèrent de privatiser la compagnie aérienne, ils jurèrent qu'il ne s'agissait que de " laisser respirer le capital " en l'ouvrant au privé. Quelques années ont suffi pour que les capitaux privés prennent le contrôle de la compagnie.

Les mêmes, ou d'autres, se verraient bien prendre de grosses parts des bénéfices attendus du développement des liaisons ferroviaires rapides... maintenant que l'État a mis l'affaire sur de bons rails pour eux.

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