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Niger : L'uranium enrichit Areva et ses actionnaires, pas la population

Quatre cadres français travaillant pour Areva ont été enlevés dans le nord du Niger par des rebelles touaregs du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ). Ce mouvement, apparu début 2007, affirme lutter pour une plus juste répartition des revenus issus de l'uranium, une matière première très présente dans le sous-sol nigérien.

En effet, si l'uranium est une richesse très convoitée par les trusts internationaux du nucléaire, le Niger reste classé parmi les pays les plus pauvres de la planète. Le groupe français Areva est le plus impliqué dans l'exploitation de ce minerai dans le nord du Niger. Il tire près de 40 % de sa production d'uranium de deux gigantesques mines à ciel ouvert, exploitées depuis quarante ans près d'Arlit et d'Akokan, à 150 kilomètres au nord d'Agadez. Et si Areva a depuis peu perdu son monopole d'exploitation, au profit de sociétés nord-américaines, sud-africaines ou chinoises, il a tout de même obtenu les droits sur l'énorme site d'Imouraren avec lequel le Niger devrait devenir le deuxième producteur mondial d'uranium.

La rébellion du MNJ a pris naissance après l'octroi de plus de cent trente nouveaux permis de recherche et d'exploitation dans cette région, fragile et vitale pour les populations agro-pastorales autochtones. Ces permis englobent la majeure partie des territoires de la région d'Agadez. Le gouvernement nigérien, qui qualifie la rébellion de « bandits armés » ou de « bande de trafiquants », a réagi en décrétant l'état d'exception et en donnant les pleins pouvoirs à l'armée. Depuis, comme en attestent les rapports d'Amnesty international et de Human Rights Watch, la population de la région vit au rythme des exécutions sommaires, des arrestations arbitraires et des tortures, des destructions de cheptel, des déplacements forcés. Les autorités ont également interdit aux médias de couvrir ce conflit armé et plusieurs journalistes, dont un correspondant de Radio-France Internationale, ont été emprisonnés pour avoir tenté de dénoncer les exactions de l'armée gouvernementale ou pour leurs liens présumés avec le MNJ.

Dans cette région, les populations sont donc à la fois spoliées et victimes des grandes manoeuvres autour de l'uranium. Pendant quarante ans, Areva a payé l'uranium nigérien à un prix très inférieur à celui du marché mondial, offrant à ses actionnaires des profits colossaux. Certes, en 2007, le gouvernement nigérien a obtenu une revalorisation des contrats, mais cette manne ne profitera qu'aux proches du pouvoir. Quant aux populations, elles resteront exclues des bénéfices des richesses exploitées, même si elles en sont les premières victimes du fait de la pollution engendrée par les mines à ciel ouvert, par la dispersion de poussières radioactives, par la contamination et l'épuisement des nappes phréatiques.

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