Travail du dimanche : Une liberté surtout patronale19/12/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/12/une2055.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Travail du dimanche : Une liberté surtout patronale

Le Sénat vient d'adopter un amendement au projet de loi sur la consommation autorisant l'ouverture

le dimanche des " établissements de commerce de détail d'ameublement ", ce qui concerne avant tout les géants du meuble et de l'équipement ménager, comme Ikéa, But, Conforama...

Ces grandes surfaces voudraient en finir avec les amendes de plus en plus élevées (300 000 euros pour Casa, 600 000 pour Alinéa) qu'on leur inflige pour ne pas avoir respecté la loi de 1906 qui imposa le repos du dimanche.

La nouvelle mesure constitue un ballon d'essai. Le gouvernement voudrait faire passer début 2008 une loi permettant aux employeurs de contraindre tous leurs salariés à travailler le dimanche, sans avoir à payer de compensations. Déjà, dans les secteurs où le travail du dimanche s'est généralisé, parfois parce que c'est nécessaire comme dans les transports, les hôpitaux, l'hôtellerie, la restauration, etc., les compensations salariales ont tendance à disparaître.

Le secrétaire d'État à la Consommation prétend qu'il répond à la " volonté des consommateurs, des professionnels et des salariés ". Du côté des consommateurs, qui sont aussi des salariés, occupés par des journées de travail à rallonge et des temps de transport interminables, l'ouverture des magasins le dimanche est une commodité. Mais c'est plus un choix par défaut, qui prend sur le temps libre, car le reste de la semaine ils n'ont guère la possibilité de faire leurs courses.

Du côté des professionnels, c'est surtout l'intérêt des grands de l'ameublement, qui réalisent une bonne partie de leurs ventes le week-end. Cette ouverture dominicale n'augmentera pas le marché, mais elle permettra à ces grandes enseignes de faire un chiffre d'affaires au détriment des petits commerces, qui ne montrent pas d'enthousiasme pour cette innovation.

Quant à invoquer l'aspiration des salariés à travailler le dimanche, c'est se moquer des gens, car si certains peuvent y trouver financièrement leur compte, la grande majorité ne tient pas à sacrifier cette journée, qu'un jour de repos en semaine ne remplace pas. Il faut tout le mépris d'un chroniqueur du Figaro pour écrire : " Désire-t-on, par ces longs dimanches d'indolence, empêcher tous ceux qui le souhaitent de créer de la richesse ? " Mais il est vrai qu'il y a peu de chances que ce plumitif soit épuisé par son travail.

" Ceux qui veulent être payés double et travailler le dimanche, pourquoi les empêcher de le faire ? ", affirmait Sarkozy dans sa campagne. Mais qui peut parler de volontariat dans ce genre de situation, qui va croire qu'un chômeur puisse refuser de venir travailler le dimanche lors d'un entretien d'embauche, quand le patron lui présente un cycle de travail incluant les week-ends ? Les salariés déjà embauchés sont-ils libres de leur choix lorsqu'une entreprise décide d'ouvrir le dimanche ? Est-ce un choix de travailler le dimanche alors que les salaires sont si faibles dans le commerce et alors que des salariés de Conforama sont passés de 1 400 à 1 100 euros par mois lorsqu'ils ont renoncé au travail du dimanche ? Dans un contexte de chômage massif, parler de volontariat pour le travail du dimanche est une duperie. Cette mesure concernera particulièrement les femmes qui sont 90 % à occuper les postes de caissières et qui constituent 85 % des contrats à temps partiel imposé de la grande distribution.

L'ouverture des magasins le dimanche dans certains secteurs entraînera sa banalisation et risque fort de déboucher sur son élargissement à d'autres secteurs. Il s'agit d'une remise en cause de la situation actuelle, une de plus, pour tous les salariés et à leur détriment... si on laisse faire.

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