Leur société

Carburants : La ministre s'engage à ne pas réduire les profits de Total and Co.

Depuis le début de l'année, les prix de l'essence ont augmenté de 14,4 % pour le super et de 16,6 % pour le gazole, et le fuel domestique à 0,73 euro n'a jamais été aussi cher. Du coup Christine Lagarde, la ministre de l'Économie, s'est sentie obligée de faire semblant de réagir. Sans même faire l'effort d'innover, elle a repris la recette de son prédécesseur en réunissant les distributeurs et les producteurs de carburants, notamment Total, le plus important d'entre eux.

Ses interlocuteurs se sont engagés à " maintenir " leurs promesses de modérer les prix en " lissant " sur plusieurs semaines les hausses à la pompe et de répercuter " immédiatement " les éventuelles baisses du prix du pétrole.

En 2005, Breton, alors ministre des Finances, avait menacé les compagnies pétrolières d'une taxe exceptionnelle sur leurs bénéfices si elles refusaient de faire un geste après une augmentation des prix de 30 %. Il les appelait à se comporter en " entreprises citoyennes " et attendait de leur part " des propositions concrètes et tangibles ". La comédie s'était poursuivie par une réunion au ministère des Finances, où chacun avait tenu des propos identiques à ceux que l'on nous ressert aujourd'hui : " Répercuter à la pompe dans les trois jours la baisse des prix du pétrole " et " lisser dans le temps les hausses ". Total s'était engagé à investir près de trois milliards d'euros dans les installations de raffinage au cours des cinq années à venir. Breton s'était félicité de cette rencontre " très efficace " qu'il avait eue avec les représentants des compagnies pétrolières.

Mais derrière ce cinéma, le prix de l'essence et du fuel avait continué de peser de plus en plus lourdement sur les usagers, et plus encore sur les plus modestes. L'Insee (l'institut officiel des statistiques) a chiffré à une centaine d'euros pour 2004 le surcroît des dépenses de carburant par ménage. Ce supplément atteignait 200 euros en 2005 et, depuis lors, la facture continue de s'alourdir pour des revenus salariaux et des pensions qui, eux, stagnent.

Aujourd'hui, la ministre Lagarde manifeste la même satisfaction que Breton en 2005, se félicitant que les distributeurs et la société pétrolière Total aient réitéré leur " engagement à modérer leurs prix de revente " des carburants à la pompe, selon les mêmes modalités que la fois précédente. Pourquoi en effet refuseraient-ils de jouer la même partie gagnante qu'en 2005 ? Cette année-là, pour ne prendre que la situation de Total, ses profits avaient dépassé 12 milliards d'euros. Un record qui fut battu dès l'année suivante, ses profits atteignant cette fois 12,5 milliards d'euros. Et les premiers chiffres de Total pour 2007 laissent penser que ce record sera au moins égalé, voire dépassé, puisque la compagnie pétrolière engrangerait un milliard d'euros de profits par mois pour les neuf premiers mois de l'année.

À défaut de faire du vélo comme elle l'a conseillé aux usagers qui trouvent le carburant trop cher, la ministre pédale pour l'équipe Total and Co.

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